Publié dans Dossier

Environnement - Aucune action de conservation concrète engagée

Publié le vendredi, 24 janvier 2020

Nous venons tout juste de tourner la page du lancement officiel de la campagne nationale de reboisement pour cette nouvelle année. A l’occasion du 60ème anniversaire de l’indépendance de la Grande île, 60 millions de jeunes plants seront notamment mis en terre tout au long de la campagne. Une action très louable. Toutefois, pour pouvoir reverdir Madagascar, le reboisement n’est pas la seule solution. En effet, à quoi cela servirait de planter des arbres alors que la coupe et l’exploitation abusive continuent de régner dans toutes les régions du pays ?
Dossier réalisé par la Rédaction

La menace plane toujours sur les forêts de Madagascar. L’initiative de reboiser près de 40 000 hectares par an est méritoire. Toutefois, il ne faut pas oublier qu’annuellement, nous perdons régulièrement au moins 100 000 hectares de forêts naturelles. Jusque-là, aucune action de conservation et de protection concrète n’a été engagée par le ministère de l’Environnement et du Développement durable (MEDD). La superficie des forêts qui disparaissent ne cesse d’augmenter. « Des actions expéditives d’application des lois afin de  stopper les défrichements devraient aussi être effectuées en parallèle avec le reboisement, à l’instar de sanctions exemplaires envers les criminels environnementaux. En outre, l’application des lois devra toujours être accompagnée d’action de développement durable et à grande échelle, ce qui permettrait d’impacter positivement sur la réussite de la conservation de nos forêts, à l’exemple du développement du grand Sud pour limiter les migrations, du montage d’une vraie vision sur la gestion durable des ressources naturelles, ou encore une revue de la valeur de nos ressources en biodiversité », suggère l’Alliance Voahary Gasy, un collectif d’organisations de la société civile engagé dans la protection de l’environnement.

Actuellement, plusieurs réserves naturelles comme Menabe Antimena ou encore Ankarafantsika (elles ont beaucoup fait parler d’elles l’année dernière) doivent en effet subir les conséquences de la migration des populations du Sud. Ces migrants brûlent les forêts pour y planter du maïs principalement. Il y a également la fabrication de charbon de bois, principale origine de la déforestation et des feux de brousse dans le pays. A cet effet, le ministère de tutelle a notamment sorti une note interdisant cette activité pour préserver notre patrimoine forestière. Ainsi, seules les personnes en possession d’un domaine forestier peuvent l’exercer. Toutefois, cette interdiction n’a pas vraiment été suivie de près. Les voyages sur les routes nationales le prouvent bien. Effectivement, tout au long des routes nationales 2 et 4, nous pouvons apercevoir des piles de sacs de charbon à vendre. Les quantités sont restées inchangées, que ce soient avant ou après la mise en place de cette mesure interdiction. La non-application des lois laisse ainsi libre cours aux exploitants illicites.
Gaspillage des ressources forestières
Menabe, Antimena et Ankarafantsika sont des réserves naturelles. Pourtant, des personnes osent s’attaquer à elles. Il n’y a rien d’étonnant à ce que les zones forestières qualifiées de « normales » finissent par disparaître au fil des années. Dans la partie sud de Madagascar, dans la région d’Anosy, toutes les forêts risqueront de disparaitre dans les dix prochaines années, si aucune action de conservation n’est lancée par les autorités concernées. Malheureusement, aucune alerte n’est lancée, et la pression est bel et présente, et surtout imminente. « Malgré le reboisement, si les activités d’exploitation abusive de la forêt persistent, toutes les forêts dans la région d’Anôsy pourraient disparaitre. La majorité de la population est habituée à une mauvaise exploitation de la forêt, générant ainsi un gaspillage de cette ressource. Ils pratiquent surtout le " tavy ". Modifiée au cours des dernières années, cette pratique est devenue l’une des plus nocives. Les étapes dans le temps ne sont plus respectées, diminuant ainsi la qualité du sol », se désole Lucas Scherpereel, directeur du Domaine de la Cascade situé à Taolagnaro, une des rares forêts non altérées par les activités humaines.

Pourtant, ce cas de la Région du Sud n’est pas un cas isolé. En effet, la plupart des exploitants forêstiers dans les différentes Régions du pays n’ont aucun savoir-faire agricole, d’où le phénomène du gaspillage. Ils brûlent les forêts pour en faire du charbon afin d’y planter ensuite du maïs ou encore du manioc. Avec ces cultures, le sol devient infertile. De ce fait, ces exploitants  recommencent le processus pour pouvoir cultiver sur une autre parcelle de terres. Ils n’arrivent pas à comprendre les conséquences irrévocables de leurs actes. Le manque de sensibilisation fait que jusque-là, il n’y a aucune prise de conscience évidente de l’importance des forêts pour le pays. Tout ce que ces gens savent, c’est qu’un arbre est synonyme d’argent, et que les revenus sont rares dans la Région. En plus, la demande reste illimitée. « Avec cette pratique, les forêts reculent de plus en plus vite, soit une destruction de près de 50 000 hectares ces dernières années. De plus, les rivières disparaissent également. Sans les arbres, les eaux de pluie n’arrivent plus à s’infiltrer dans la terre, asséchant celle-ci et ses environs. Si cela continue, la culture du riz pourrait complétement disparaître vu qu’il n’y aura plus de sources d’eau pour irriguer les rizières », rajoute le gérant du domaine.

Le basculement énergétique

Quand il est question de destruction des forêts, le basculement énergétique reste un point majeur à aborder. Si nous en sommes toujours là aujourd’hui, c’est parce que nous n’avons pas encore de solutions pérennes pour lutter efficacement contre la déforestation, outre le reboisement massif. Effectivement, les consommateurs ont besoin d’une source d’énergie accessible à leur pouvoir d’achat. Et jusque-là, cette source d’énergie reste principalement le charbon de bois. Et tant qu’il y aura de la demande, il y aura toujours de l’offre pour la satisfaire. Tant que cet effet de cause à effet ne sera pas supprimé ou du moins allégé, la destruction de nos forêts continuera. Le MEDD a notamment déjà lancé l’année dernière, une vente en détail de gaz domestique. Mais actuellement, personne n’a donné suite concernant la période d’essai, si elle a été fructueuse ou non. Pourtant, la mise en place de cette alternative pourrait être vraiment bénéfique pour la préservation de nos forêts. En 2012 par exemple, selon les chiffres exposés par le Fonds mondial pour la nature (WWF Madagascar), il a fallu détruire près de 15 000 ha de forêts pour pouvoir subvenir aux 28 500 tonnes de demande en charbon d’une seule ville. Donc, ces chiffres seraient multipliés au moins par dix pour satisfaire les besoins de tout le pays.
La forêt n’est pas la seule victime
Il s’avère que les problèmes liés à la déforestation ne concernent pas seulement les forêts. Elles ne sont pas les seules victimes. Avec la destruction des zones forestières, les animaux perdent également leur habitat naturel, nuisant considérablement à leur survie. Dans certains pays de l’Afrique, les touristes font des safaris pour pouvoir observer des animaux à leur état sauvage. Malheureusement, à Madagascar, cette activité n’est pas possible. Effectivement, la majorité de la faune présente dans l’île Rouge se réfugie désormais dans les zones protégées comme les parcs ou les différentes réserves. Dans ces zones, ces réseves animaliers sont sûrs de ne pas mourir de faim ou de mourir tout court. Outre la destruction de leur habitat naturel, le braconnage menace également leur bon développement. Il n’y a qu’à voir ce que les pêcheurs ont fait au bébé dauphin malade retrouvé dans la région de Taolagnaro. Aucun réflexe de sauvetage ou autre action n’a été entreprise, sauf de la vantardise sur les réseaux sociaux. Pourtant, les touristes, internationaux ou nationaux, dépensent des sommes faramineuses pour pouvoir observer ces espèces de plus près. Aujourd’hui, même l’espèce emblématique du pays,  notamment le lémurien, est menacé d’extinction. Et la principale cause est la destruction des forêts.

Vu tous ces points, les autorités concernées, ainsi que chaque citoyen, doivent développer d’autres initiatives d’accompagnement du reboisement afin de préserver notre patrimoine naturel mais aussi pour arriver à reverdir Madagascar.

Des critiques constructives de l’AVG
L’Alliance Voahary Gasy soutient l’initiative du ministère de tutelle pour la relance du reboisement à Madagascar. L’AVG déplore de ce fait les critiques négatives éménant des personnes ou organisations qui n’ont rien avancé à ce propos depuis l’indépendance de l’île. Etant donné que certains des membres de l’AVG ont des expériences prouvées en matière de foresterie (Association des ingénieurs forestiers de Madagascar, SAF FJKM, etc…),  l’AVG émet toujours des remarques constructives afin de garantir la réussite d’une telle initiative. Alliance Voahary Gasy en tant qu’Institution a déjà apporté sa contribution le 21 décembre dernier et le fera de nouveau ce mois-ci. Elle encourage que les reboisements se fassent intégralement au mois de décembre afin que les jeunes plants puissent bénéficier des précipitations de toute la saison des pluies. Le suivi de la plantation (regarnissage, pare-feu, démariage, etc.) devra se faire en saison sèche et au moins pendant deux années. C’est une étape tout aussi importante qui mérite également des mobilisations officielles.

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Editorial

  • Aucune excuse II
    Le délai formel de dix jours ordonné par le Chef de l’Etat Rajoelina Andry, pour rendre la ville des mille propre, débarrassée de ses ordures, expire. Quel bilan ? Nommé par arrêté du ministère de l’Intérieur en date du 1er mars 2024, le Président de la délégation spéciale (PDS) d’Antananarivo- Renivohitra, le sénateur Richard Ramanambitana, prit ses fonctions immédiatement. Le lundi 4 mars, le Chef de l’Etat honorait de sa présence la remise des matériels par l’ambassadeur du Japon pour renforcer le ramassage des ordures à Antananarivo. Une occasion pour le Président de la République de donner une consigne nette et stricte à l’endroit du nouveau PDS présent sur le lieu. En effet, le Président Rajoelina donne à l’équipe de la CUA, conduite par Ramanambitana Richard, dix jours pour compter du 5 mars de ramasser les ordures de Tanà. Les matériels sont là, « vous n’avez aucune excuse », renchérit…

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