Publié dans Economie

Madagascar - Türkiye - 15 ans de relations économiques et commerciales

Publié le mardi, 25 novembre 2025

Au-delà de la diplomatie, la présence turque à Madagascar prend une dimension économique.

Depuis l’ouverture de l’ambassade de Türkiye à Antananarivo en 2010, les relations entre les deux pays ne cessent de se renforcer. La visite du Président Recep Tayyip Erdogan a marqué le début d’une nouvelle ère de coopération et d’amitié. L’ambassade agit surtout comme une « ambassade économique ». Cette dernière soutient les entreprises turques qui veulent investir à Madagascar et encourage les échanges commerciaux.

Selon l’ambassadeur Ishak Ebrar Cubukcu, « son objectif est de construire un partenariat équilibré et bénéfique pour les deux pays ». En mars 2024, un accord de coopération commerciale et économique a été signé à Antalya. Il prévoit la création d’une commission mixte pour mieux organiser les relations économiques. Cet accord ouvre la voie à des projets plus concrets et plus ambitieux. Les secteurs de la construction et de l’énergie sont les plus prometteurs. La Türkiye possède une grande expérience dans ces domaines.

Selon le classement 2025 du magazine « Engineering News Record », 45 entreprises turques figurent parmi les plus grandes sociétés mondiales de construction. « Ces entreprises peuvent aider Madagascar à construire des infrastructures modernes, solides et à coûts raisonnables », a-t-il souligné. Grâce à cette coopération, la Grande île pourrait moderniser ses routes, hôpitaux, écoles et installations énergétiques. Tout cela favoriserait aussi la création d’emplois et le transfert de technologies vers la population locale. D’autres secteurs sont également porteurs : la formation professionnelle, le tourisme et les infrastructures hôtelières.

Avec 62 millions de visiteurs en 2024, la Türkiye est la cinquième destination touristique mondiale. Son expérience peut inspirer Madagascar pour valoriser son patrimoine naturel et culturel. Mais il reste encore des défis à surmonter. Selon le diplomate, le principal problème est l’absence d’accords juridiques solides. Aucun texte n’existe encore sur la double imposition ou la protection des investissements. Cela freine l’installation durable des entreprises turques. « Il faut rassurer l’investisseur pour assurer l’investissement », a-t-il souligné, en insistant sur la nécessité de simplifier les démarches administratives et de rendre l’économie plus compétitive.

Commerce bilatéral estimé à 80 millions de dollars par an

Le volume des échanges commerciaux entre la Türkiye et Madagascar s’élève à plus de 80 millions de dollars par an. Selon Selçuk Mert, conseiller commercial de l’ambassade de Türkiye à Madagascar, ces échanges connaissent une dynamique encourageante malgré certaines fluctuations. En 2023, ils ont atteint un record de 203 millions de dollars, contre 101 millions en 2022 et 82 millions en 2024. Entre janvier et septembre 2025, les exportations turques vers Madagascar se sont élevées à 40 millions de dollars, tandis que les importations malagasy vers la Türkiye ont atteint 10 millions.

Ainsi, le commerce bilatéral pourrait approcher 70 millions de dollars d’ici la fin de l’année. Les produits en fer et en acier représentent près de la moitié des exportations turques. Viennent ensuite la farine de blé, les machines et appareils, les articles manufacturés (serviettes hygiéniques, couches pour bébé) et la margarine. Du côté malagasy, la Türkiye importe principalement des légumes comestibles, du graphite naturel, du nickel, des fruits frais et des clous de girofle. En 2023, les exportations turques de fer et d’acier vers Madagascar s’élevaient à 18 millions de dollars, contre 29 millions en 2024. Les importations turques de produits agricoles malagasy ont représenté 6 millions de dollars en 2023 et 5 millions en 2024.

Ces variations s’expliquent par plusieurs facteurs. D’une part, les activités dans les secteurs de la construction et de l’industrie à Madagascar influencent directement la demande d’acier. D’autre part, la production agricole malagasy dépend des conditions climatiques : cyclones et inondations peuvent réduire les volumes exportables. Par ailleurs, plusieurs secteurs offrent un fort potentiel. La Türkiye fournit une large gamme de matériaux de construction : ciment, peintures, carrelages, verre et équipements pour cuisine et salle de bains. Madagascar, de son côté, possède des ressources minières et agricoles comme la vanille, le litchi et les pierres semi-précieuses, encore peu connues en Türkiye.

Cependant, des obstacles subsistent. Les droits de douane élevés, les procédures administratives longues et l’absence d’accords bilatéraux pleinement appliqués ralentissent les échanges. De plus, les tensions au Moyen-Orient perturbent le transport maritime. Les navires évitent la Mer Rouge et passent par le cap de Bonne-Espérance, ce qui double la distance et augmente les coûts. Malgré ces difficultés, la volonté de renforcer le partenariat reste forte. Selon lui, la promotion des missions commerciales et la participation aux salons internationaux permettront de rapprocher les entreprises, de valoriser les produits malagasy et de stimuler un commerce bilatéral plus solide et durable.

La connectivité aérienne comme moteur de développement

Le volume des échanges commerciaux et touristiques entre Türkiye et Madagascar profite beaucoup de la présence de Turkish Airlines. Selon l’ambassadeur Ishak Ebrar Cubukcu, la compagnie joue un rôle stratégique. Elle relie Madagascar au monde entier via Istanbul, un hub majeur. Elle facilite également le transport de fret, permettant aux produits malagasy d’atteindre de nouveaux marchés. Le réseau de Turkish Airlines compte 508 avions desservant 352 destinations dans 131 pays. Depuis l’ouverture de la ligne Antananarivo-Istanbul en 2015, la connectivité de Madagascar s’est beaucoup améliorée. Trois vols hebdomadaires, complétés par Turkish Cargo, assurent le transport des biens, des personnes et des capitaux. En novembre 2025, le passage du Boeing 787 Dreamliner à l’Airbus A350-900 a permis d’augmenter la capacité de fret de 110 à 160 m3 par vol. « Cette amélioration facilite le commerce entre Madagascar et le reste du monde. Grâce à son réseau mondial, Turkish Airlines stimule le commerce, le tourisme et les investissements », a-t-il déclaré.

La liaison Antananarivo-Istanbul est aussi un levier pour l’économie malagasy. Elle renforce la compétitivité du pays et encourage les investissements étrangers. Elle soutient le tourisme en offrant une meilleure visibilité internationale. Chaque année, 130 millions de voyageurs transitent par les deux aéroports d’Istanbul, ce qui ouvre Madagascar à de nouveaux marchés. Cette liaison contribue à la diversification de l’économie, à la création d’emplois et à la promotion des produits malagasy. Cependant, le niveau élevé des taxes aéroportuaires reste un frein. Pour l’instant, Turkish Airlines dessert Antananarivo via Maurice, ce qui rallonge le voyage de quatre heures et augmente les coûts.

Selon M. Selçuk Mert, près de 25.000 passagers voyagent chaque année entre Türkiye et Madagascar grâce à Turkish Airlines. La compagnie offre des avions modernes et un service de qualité, ce qui lui a valu d’être élue meilleure compagnie d’Europe et sixième meilleure au monde par Skytrax en 2025. Turkish Cargo transporte aussi une part importante du fret malgache : entre 30 et 40 % du total annuel. Les produits transportés comprennent 50 % de textile, 40 % de vanille, le reste étant des litchis, huiles essentielles, artisanat et fleurs. Des défis subsistent toutefois. « Turkish Airlines souhaite renforcer sa présence dans la région. Pour cela, Madagascar doit développer ses services logistiques, simplifier les procédures administratives et créer un environnement favorable. Cela permettrait d’augmenter la fréquence des vols et de stimuler le commerce et le tourisme », a-t-il ajouté.

Madagascar attire 30 entreprises au Forum Türkiye-Afrique

Le cinquième Forum Türkiye-Afrique sur les affaires et l’économie (TABEF) s’est tenu les 16 et 17 octobre 2025 à Istanbul. L’événement a été organisé par le ministère du Commerce de Türkiye, en coopération avec l’Union Africaine et le Conseil des relations économiques extérieures (DEIK). Plus de 4 000 participants venus de 50 pays africains y ont pris part. Le thème du forum était : « Renforcer les relations Türkiye-Afrique et partager les gains communs ». Pendant deux jours, il a permis plus de 2.000 réunions d’affaires, ainsi que 9 panels et 5 présentations de pays, avec la participation de ministres et de représentants du secteur privé. Malgré les défis économiques et sociaux, Madagascar a attiré 30 entreprises Türkiye et africaines. Ces sociétés venaient de secteurs variés : construction, santé, énergie, textile, transport et numérique. Le stand malagasy a présenté les opportunités d’investissement et a permis de renforcer les échanges commerciaux avec la Türkiye et d’autres pays africains.

Lors de la clôture, le Président turc Recep Tayyip Erdogan a rappelé les progrès des relations Turquie-Afrique depuis 2005, année proclamée « Année de l’Afrique » en Türkiye. Il a souligné que ces 20 dernières années ont permis de construire un partenariat solide et stratégique. « Une forte synergie s’est créée pour l’avenir de nos relations commerciales avec l’Afrique », a-t-il affirmé. Erdogan a aussi annoncé que le quatrième Sommet Türkiye-Afrique aura lieu l’an prochain. Le ministre turc du Commerce, Omer Bolat, a rappelé que le volume des échanges Turquie-Afrique a été multiplié par sept, atteignant 40 milliards de dollars en 2025, avec un objectif de 50 milliards en 2028. Le président de DEIK, Nail Olpak, a ajouté que le commerce bilatéral pourrait atteindre 75 milliards grâce à de meilleures infrastructures, des services financiers améliorés et une coopération technologique renforcée.

Carinah Mamilalaina

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Editorial

  • Appel controversé !
    Le Gouvernement lance un Appel à manifestation d’intérêt pour le recrutement de 23 chefs de Région. La date de clôture du dépôt des dossiers de candidature est fixée pour le 28 novembre prochain. D’emblée, des observateurs attentifs trouvent curieux d’acter prestement un tel « Appel ». Y a-t-il urgence ? Est-ce qu’un Appel à manifestation d’intérêt pour recruter des chefs de Région présente un caractère si urgent. Vu les urgences prioritaires du moment, cet Appel ne peut-il pas attendre un peu ? N’y a-t-il pas d’autres choses plus importantes et plus essentielles ?

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