Désigné le 6 février 1975 par le Général de Division Gabriel Ramanantsoa en qualité de Chef d'Etat et de Gouvernement, le colonel Ratsimandrava prit avec humilité et bravoure les rênes du pouvoir. D'aucuns n'oublieront jamais la célèbre et historique phrase « Tsy hiamboho adidy aho mon Général » qu'il avait prononcé au moment de la passation de pouvoir entre le Général Ramanantsoa et lui-même. Ratsimandrava ne sous-estime jamais les risques encourus. Il sait pertinemment que les ennemis, il en a beaucoup, ne le laisseraient pas tranquille.
Le premier écueil qu'il fallait gérer au plus vite est la séquelle de la tension interne au sein de l'équipe gouvernementale du temps de Ramanantsoa. Un sourd litige déchire Ratsimandrava et Ratsiraka, deux jeunes officiers supérieurs et figures de proue du Gouvernement Ramanantsoa. Un problème profond de leadership les secoue. Ratsimandrava représente l'élite des Hauts Plateaux tandis que Ratsiraka celle de la Côte. Il se trouve que le choix de Ramanantsoa portait sur Ratsimandrava. Ce qui n'est pas sans conséquence dans le microcosme social et politique de l'époque.
Ratsimandrava croit dur comme fer que le développement du pays passe par le Fokonolona, la cellule de base de la communauté traditionnelle malagasy. C'est à travers le Fokonolona, plus précisément de la Commission économique locale le « Vatoeka » qu'on peut redynamiser la relance économique du pays. En sa qualité de ministre de l'Intérieur, le colonel arpentait monts et vallées jusque dans les zones reculées pour professer sa foi sur l'efficacité du Fokonolona en tant que moteur du développement. Son entreprise n'est pas sans risque pour sa propre gouverne sinon pour sa sécurité personnelle.
L'implication du Fokonolona dans le processus du développement de la Grande île représente un danger potentiel pour les grandes entreprises économiques et commerciales fortement ancrées à l'intérieur du tissu social et économique du pays. Héritées du mécanisme colonial et néocolonial, elles ne tolèrent point toute tentative de porter ombrage à leurs intérêts.
Devenu le numéro un du pays, le colonel Ratsimandrava gêne sérieusement et symbolise le péril pour les grandes sociétés telles les Compagnies Marseillaise et la Lyonnaise. D'autres lèvent les boucliers aussi. L'assassinat du 11 février 1975, cinq jours seulement après la prise de fonction, ne peut être qu'une suite logique de la tension qui pesait sur l'atmosphère qui prévaut dans le pays après le départ subit de Ramanantsoa. En fait, une véritable cacophonie régnait ! Tout le monde du camp adverse y trouve leur compte tandis que le pays vit sous le choc.
Apparemment, la date du 11 février pourrait être reléguée au monde du silence. Mais, en réalité il est difficile pour la Nation d'oublier le courage et l'abnégation de l'un de ses fils.
Ndrianaivo