« Les jobs de vacances étaient pour nous un moyen de nous assurer les frais d’inscription pour la prochaine années académique. Nous travaillons dans un établissement hôtelier situé dans le nord de l’île. Ce dernier n’ouvre que durant les vacances d’été et n’a pu rouvrir ses portes pour cette année, faute de trésorerie, après la longue période de confinement », déplore un étudiant au niveau « Licence » de l’Institut national du tourisme et de l’hôtellerie sis à Ampefiloha. Cet étudiant a dû se résigner à chercher un emploi hors de son domaine de compétence pour des questions de survie, tout en espérant un jour pouvoir reprendre la mention Tourisme et Hôtellerie jusqu’au niveau « Master ».
L’Organisation mondiale du tourisme estime que 120 millions d’emplois directs pourraient être perdus dans le monde, alors que ce secteur représente près de 20 % de l’emploi mondial. Dans les pays en développement comme la Grande île, près d’un emploi sur dix est lié au tourisme qui contribue à 10 % au produit intérieur brut.
Sales boulots
Pour secourir un secteur touristique touché en pleine saison, sa transformation est envisagée, notamment par le développement des activités numériques. Toutefois, les aides gouvernementales attribuées visent surtout à inciter les entreprises à ne pas licencier leur main-d’œuvre, en particulier la plus fragile. La question de la transformation des conditions de travail y est quasiment absente et semble entrer en tension avec l’objectif de relance de la croissance économique du secteur. Le rôle de la crise pour une transformation profonde des conditions de travail du secteur est ambivalent. D’un côté, elle offre des opportunités pour la visibilité de cet enjeu. Avec la Covid-19, la population a eu une prise de conscience sur des métiers invisibles, souvent peu valorisés socialement, voire perçus comme des « sales boulots ». A titre d’exemples, on peut citer le métier du personnel soignant, celui du personnel de ménage ou de gestionnaire des déchets ménagers.
Par ricochet, cette visibilité pourrait bénéficier aux revendications des travailleurs précaires du tourisme, à la reconnaissance de leurs compétences et de leur rôle pour la sécurité sanitaire comme le personnel de ménage. De l’autre côté, la nécessité de relancer le tourisme entre en tension avec la volonté de dessiner un modèle alternatif, plus respectueux des travailleurs. Ce qui souligne la nécessité d’améliorer la qualité des emplois du tourisme pour répondre à la crise. Pourtant, le contexte de chômage massif offre un rapport de force plus défavorable aux salariés.
Hary Rakoto