Alors que les regards étaient tournés vers les grandes puissances financières lors des assemblées annuelles de la Banque africaine de développement à Abidjan, la délégation malgache, menée par la ministre de l’Economie et des Finances Rindra Hasimbelo Rabarinirinarison, a discrètement avancé ses pions. En marge de l’évènement, un entretien stratégique a été tenu avec les représentants du centre de Coopération multilatérale pour le financement du développement (MCDF), un organisme basé à Pékin. Cette rencontre pourrait bien marquer un tournant dans la manière dont Madagascar envisage la mobilisation de ses financements pour le développement. L’enjeu étant d’accéder à des dons et appuis techniques qui, selon les premiers échanges, pourraient concerner en priorité la réforme des marchés publics. « Ce genre de partenariat pourrait nous permettre d’assainir et de moderniser nos procédures d’appel d’offres, un secteur encore truffé de zones d’ombre », témoigne un haut fonctionnaire du ministère de l’Economie. Le MCDF, de son côté, semble également y trouver son compte : en échange de son soutien, il souhaiterait que Madagascar joue un rôle de levier diplomatique auprès des grandes banques multilatérales, telles que le FMI ou la Banque mondiale, notamment dans le cadre de la reconstitution de ses fonds propres.
Diversification
Ce partenariat naissant s’inscrit dans une logique plus large de diversification des sources de financement, à l’heure où les conditionnalités imposées par les bailleurs traditionnels deviennent de plus en plus exigeantes. « Il est temps de ne plus mettre tous nos œufs dans le même panier », avance un membre du cercle de réflexion des économistes de Madagascar, qui salue cette ouverture vers une institution encore peu connue sur le continent. Si les discussions sont encore à un stade préliminaire, elles révèlent une volonté affichée de la part du Gouvernement de prendre des initiatives, quitte à sortir des sentiers battus. « On ne peut plus se permettre d’attendre que les financements tombent du ciel. Si on veut avancer, il faut aller les chercher », résume un membre de la délégation présent à Abidjan. Certes, il faudra veiller à ne pas tomber dans des formes de dépendance masquée, mais l’opportunité d’un partenariat plus souple, et potentiellement désintéressé, mérite d’être explorée. Dans un contexte où chaque dollar compte, la moindre piste sérieuse mérite d’être creusée. Et pour une fois, l’initiative semble venir de nous. C’est peut-être le signe que les temps changent.