Une délégation conduite par le ministre de l’Environnement et du Développement durable, Max Andonirina Fontaine, est en Thaïlande en vue du rapatriement des animaux sauvages de Madagascar confisqués depuis mai dans ce pays d’Asie du Sud-Est. Les envoyés d’Antananarivo superviseront le processus de rapatriement des 963 animaux vivants, dont 48 lémuriens et des tortues terrestres.
Les formalités prévues à cet effet se tiendront, le 27 novembre, au siège du ministère thaï des Ressources naturelles et de l’Environnement. Trois vols de Qatar Airways programmés pour le 28 et le 30 novembre et le 2 décembre, embarqueront les cargaisons animalières à destination d’Afrique du Sud, d’où elles seront ramenées à Antananarivo par des vols de la compagnie sud-africaine Airlink. Le ministre fera lui-même une communication officielle à son retour au pays.
La semaine passée, deux publications thaïlandaises ont annoncé la décision des autorités thaïes de restituer à Madagascar ses animaux qui appartiennent aux Malagasy. Les lémuriens sont les premiers à débarquer à l’aéroport international d’Antananarivo Ivato dans l’après-midi du 29 novembre. « Ce sont mes enfants qui rentreront chez eux et je dois y être, le moment venu, pour les recevoir », a dit l’éminent primatologue Jonah Ratsimbazafy, surnommé aussi le « père des lémuriens ».
Un protocole strict sera appliqué au retour de ces reptiles et mammifères au bercail. Les conditions de voyage seront optimisées pour les mettre à l’abri d’une fatigue excessive qu’aura causée le long périple. La Fondation pour les aires protégées et la biodiversité de Madagascar, qui a assuré les frais de garde de ces animaux en captivité en Thaïlande, a financé l’acquisition des cages à animaux pour leur transport. Aucune précision sur le fret aérien en préparation n’a pu être obtenue.
Dès leur arrivée, les animaux seront pris en charge par des soigneurs expérimentés. « Les novices n’auront pas la chance de s’occuper d’eux », prévient Ratsimbazafy. Ils seront de fait mis en quarantaine dans des sites d’accueil identifiés et contactés au préalable par le ministère. Certains sont en provinces à l’instar du parc privé Reniala à Mahajanga, créé en 1997.
Dans un premier temps, les tortues seront mises en quarantaine dans la Capitale, où elles seront soumises à un examen sanitaire minutieux, selon Dr Tsanta Fiderana Rakotonanahary, cheffe de Veterinary Support chez Turtle Survival Alliance (TSA) Madagascar. Elles seront placées à un endroit isolé, aménagé spécialement pour elles et sous la responsabilité permanente de deux médecins vétérinaires avec des étudiants. Il est tabou de les mélanger avec leurs congénères, qui ont la chance de ne pas avoir bougé de force du sol malagasy.
Selon elle, il sera indispensable de détecter, chez ces tortues, toutes éventuelles présences de germes pathogènes comme l’herpèsvirus, l’adénovirus, le ranavirus, le mycoplasme et la coccidiose intranucléaire. Ceux-ci sont connus avoir causé des problèmes de santé majeurs chez d’autres espèces de tortues dans le monde. Plusieurs autres paramètres sanitaires incluant l’analyse sanguine seront pris en compte.
Une fois que les soigneurs seront sûrs de la santé et de la résistance physique de ces reptiles, les tortues radiées (Astrochelys radiata) seront renvoyées dans l’Anôsy. Les spécimens de tortue araignée (Pyxis arachnoides), quant à eux, seront dirigés vers la région Atsimo Andrefana. Leur unique habitat naturel au monde, où ils ont été enlevés par des trafiquants, se trouve dans ces régions.
Le 1er mai, les autorités thaïes, sur la base des renseignements fiables, ont intercepté, dans la province de Chumphon, 1 234 tortues en vie et mortes avec 48 lémuriens. Parmi les reptiles saisis, 357 sont des tortues radiées et 877 tortues araignées, des espèces en danger critique selon la Liste Rouge de l’UICN.
Les lémuriens confisqués, quant à eux, sont 16 lémurs catta (Lemur catta) et 32 lémurs bruns (Eulemur fulvus), respectivement en danger et vulnérables, d’après la Liste Rouge. Six personnes ont été arrêtées avec ces animaux inscrits à l’Annexe I de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES). La survie des espèces dans cette catégorie est la plus compromise.
Les informations, qui ont alors circulé, ont rapporté que ces animaux, en provenance de Madagascar, ont transité par l’Indonésie avant d’atterrir sur le sol thaï. L’affaire de grosse prise à l’étranger a généré des discours enflammés.
Une délégation de la justice thaïe, dirigée par un procureur d’investigation spéciale, est venue à Antananarivo en août, afin de discuter du démantèlement d’un réseau de trafiquants international derrière l’exportation illégale des espèces sauvages de Madagascar. Un taskforce regroupant la Thaïlande, la Malaisie, l’Indonésie, le Taiwan et Madagascar a également vu le jour dans ce sens. En tout cas, le présent rapatriement a été déjà, depuis août, trois fois reporté.
M.R.