Publié dans Politique

Assassinat du Colonel Ratsimandrava - 50 ans après, le mystère reste entier

Publié le lundi, 10 février 2025

Mardi 11 février 1975 - mardi 11 février 2025. Jour pour jour, l’assassinat du Colonel Richard Ratsimandrava a 50 ans aujourd’hui. Au moins, une grande question reste sans réponse claire au sujet de ce projet funeste qui a marqué l’histoire contemporaine de Madagascar : qui étai(en)t le(s) vrai(s) commanditaire(s) du crime et pour quelle(s) raison(s) ? En un demi-siècle, personne n’est parvenu à percer le mystère.

L’événement tragique a fait couler beaucoup d’encre sans pour autant que la soif de connaître la vérité soit étanchée. Trop de zones d’ombre entourent cette tragédie parmi les plus sombres de l’histoire moderne de la nation malagasy. La riche littérature historique consacrée à la tentative de mettre la lumière sur elle se révèle incomplète pour apaiser la curiosité générale car l’énigme demeure toujours entière.

Beaucoup de ceux qui s’estiment avoir été dans le secret des dieux révèlent des renseignements que les communs du mortel ont ignorés pendant longtemps. Des orateurs se sont exprimés sur les grands dossiers. Les révélations, tout intéressantes qu’elles soient, laissent quand même les observateurs avides d’informations véridiques sur leur faim. Il est des informations que personne n’ose révéler. Celles sur l’identité des bourreaux du Colonel Richard Ratsimandrava en font partie.

Le sociologue André Rasolo a avancé la thèse de lutte pour le pouvoir comme source lointaine de l’assassinat. « Divisé à l’intérieur, contesté de l’extérieur, le gouvernement Ramanantsoa est condamné à disparaître. Le 25 janvier 1975, le général le dissout. ‘‘Notre pays, dit-il, comme tous les pays du monde, traverse actuellement une période difficile. Devant les différents problèmes qui existent et auxquels nous devons faire face, la direction des affaires nationales et le gouvernement ont besoin d’un souffle nouveau. Aussi, après avoir mûrement réfléchi, j’ai décidé de dissoudre le gouvernement’’. Du coup, la lutte pour la prise du pouvoir est ouverte. » 

L’officier général à la tête du directoire militaire a dû plier bagage le 5 février au profit du Colonel Richard Ratsimandrava qui partira tragiquement cinq jours plus tard. Quatre Chefs d’Etat se succèdent durant les six premiers mois de 1975 pour illustrer l’ouverture de la lutte pour la prise de pouvoir évoquée par André Rasolo. A ses côtés, d’autres parlent de causes côtières et de complot maoïste. Le drame s’est en effet produit en pleine Guerre froide entre les anciens deux blocs.

Voici aussi ce que dit l’historien Juvence Fabiency Ramasy dans sa thèse de doctorat en science politique (2010) : « Après une tentative avortée de coup d’Etat en décembre 1974 sur l’initiative du colonel Bréchard Rajoanarison, et d’une demande de l’opposition, c’est-à-dire le Parti socialiste malgache (PSM), le Mouvement national pour l’indépendance de Madagascar (Monima), et le Mpitolona ho an’ny fandrosoan’i Madagasikara (Parti pour le progrès de Madagascar anciennement Parti pour le pouvoir prolétarien, MFM) réclamant l’instauration d’un gouvernement de coalisation, le général Gabriel Ramanantsoa transmettait tous ses pouvoirs au profit du Colonel de gendarmerie Richard Ratsimandrava, le 5 février 1975. Ce dernier fut assassiné par des éléments du Groupe mobile de police (GMP, héritier des Forces républicaines de sécurité) quelques jours plus tard, soit le 11 février dans des circonstances qui restent encore non élucidées. »

Mais même le lieu exact de l’assassinat divise jusqu’à maintenant. Selon une révélation du général Ferdinand Razakarimanana, le feu général Raobelina, son directeur de cabinet à la province autonome d’Antananarivo, était parmi les témoins entendus dans le cadre de l’affaire Ratsimandrava. De son vivant, l’officier général lui a soufflé à l’oreille que le Colonel avait réellement trouvé la mort à Ambohijatovo Ambony et non à Ambohitsorohitra.

Le professeur Armand Rasoamiaramanana, ancien directeur général de la Recherche, a livré exactement la même version. Il était un témoin direct par hasard de la fusillade à Ambohijatovo Ambony le soir du 11 février 1975. Il avait vu de ses propres yeux, selon ses dires, le Colonel se pencher vers l’avant de son siège arrière de la limousine présidentielle criblée de balles étant donnée la rafale (cf. La Vérité du 14 février 2019).

L’intérêt historique de l’événement, l’un des plus sombres et des plus énigmatiques de l’histoire contemporaine du pays, est porté sur l’intérêt du présent et du futur aussi. Mais ce changement d’axe n’efface pas dans les esprits le désir de connaître la vérité. L’on veut toujours savoir le vrai mobile de l’élimination du colonel Richard Ratsimandrava le 11 février 1975, l’identité des criminels et le lieu où il était réellement achevé.

Les récits sont nombreux et les théories aussi. Tant d’historiens, de politologues et de témoins ont apporté leurs contributions pour tenter de faire découvrir le caché. Le problème est que les faits ne sont pas reproductibles. Force est alors de se contenter des récits qui prennent forme d’effort de reconstitution des séries d’événements. Réciter, c’est déjà expliquer.

Beaucoup de choses ont été entendues sur le crime odieux de février 1975 dont la raison effective a été attribuée à de multiples causes. Toutes les tentatives d’éclairage avancées jusqu’ici sont jugées insatisfaisantes. Le dernier rebondissement retentissant date de l’époque où le feu Président Didier Ratsiraka, l’assassin présumé selon certains, a fait une révélation sur une station télé privée d’Antananarivo.

Dans une interview, il a alors attiré l’attention sur un passage du livre écrit par l’historienne Françoise Raison-Jourde. La séquence a cité le supposé déroulement de l’assassinat au bureau même de la principale victime. Le lieutenant Vonimbola, son aide de camp, aurait facilité l’effacement des preuves et l’évacuation du corps sans vie du Colonel, d’après le récit de l’historienne.

Feu Didier Ratsiraka a dit que personne n’a jamais cherché à enquêter l’officier qui aurait été de mèche avec les tombeurs du colonel. L’officier incriminé appartient à une famille très puissante du Nord de l’île. Le questionnement de 

l’ancien locataire d’Iavoloha n’a pas de réponse jusqu’ici. Curieusement, il était emporté par une mort naturelle quelques jours seulement après sa révélation.

Les intellectuels malagasy se doivent de poursuivre l’investigation sur l’assassinat du Colonel Richard Ratsimandrava. Il s’agit 

d’un devoir de mémoire auquel les institutions de recherche et l’Académie tiennent énormément. Les intellectuels nationaux sont encouragés à contribuer à la réécriture de l’histoire de Madagascar. La suppression du Colonel qui reste quand même une énigme entière 50 ans plus tard en fait partie intégrante.

Chaque année, depuis 2014, la journée du 11 février est consacrée à la mémoire des membres des Forces de l’ordre malagasy tués en plein service commandé. Ensemble, les trois niveaux de la sécurité et de la défense à Madagascar à savoir la Police nationale, la Gendarmerie nationale et l’Armée commémorent cette date historique.

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Editorial

  • 7 février 2009
    Seize ans après, la flamme demeure vive ! La flamme de la mémoire et surtout de la douleur reste allumée ! Plusieurs personnes sont décédées. Le sang a coulé. Drame, on n’est pas jusqu’à présent en mesure d’identifier ni de dresser exactement le nombre des victimes ! Seize ans après, les proches et les amis des victimes attendent toujours des nouvelles de leurs siens. En effet, le bilan reste malheureusement et curieusement du domaine du mystère. Quand est-ce qu’on l’aura élucidé cette triste et douloureuse affaire ?

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