Approche inverse
La forte emprise des technologies de l’information et de la communication sur le quotidien fait changer les pratiques. Auparavant, deux Chefs de l’Etat se sont adressés à la population via des émissions hebdomadaires télé- et radiodiffusées. C’était le cas du « Ny tenin’ny Filoha » sous le second mandat du Président Marc Ravalomanana (2007-2009) et du « Fotoam-bita » (Le rendez-vous) durant la présidence de Hery Rajaonarimampianina. Aux Etats-Unis, le président Donald Trump a toujours été prompt à publier des messages susceptibles de capter l’attention du monde entier via les réseaux sociaux. Mais c’est l’approche inverse que l’actuelle équipe d’Iavoloha entend valoriser. En effet, le site web de la Présidence a été redésigné pour intégrer la nouvelle rubrique « Ecrire au président ». En voici le lien : http://www.presidence.gov.mg/ecrire-au-president.html. Pour l’instant, la section est entièrement affichée en langue nationale. C’est significatif. Les Malagasy d’abord. Le correspondant est requis de décliner sa civilité et son identité. Il lui est aussi demandé de communiquer ses coordonnés (adresse, numéro de téléphone et adresse mail éventuellement) et de spécifier la nature de son message. De fait, on peut aussi utiliser la même interface pour s’adresser à la Première dame et aux collaborateurs du Président.
Evolution des mœurs
La Gendarmerie, sous l’impulsion du général de division Richard Ravalomanana, le nouveau secrétaire d’Etat chargé de la gendarmerie, a été la première institution étatique à avoir eu l’idée de mettre en place une « cellule de traitement et de suivi des doléances » depuis l’avènement du nouveau régime. L’initiative, a priori d’une efficacité certaine, a demandé à être répliquée à d’autres démembrements de l’Etat, ce qui aurait été chose faite pour Iavoloha.
Les correspondances ont toujours servi de canaux d’information entre les dirigeants et les administrés. Les boîtes à doléances disposées dans les différents services ont aussi fonctionné selon le même esprit. Mais les correspondances avec les responsables étatiques, dans leur forme classique, ont comporté beaucoup de failles. De plus, l’ancien système a semblé trop lent pour répondre aux attentes du public. Le temps est alors à l’évolution des mœurs.
Bien que conçue suivant les rudiments technologiques, la plateforme de communication avec le sommet de l’Etat se plie à la logique de fonctionnement de la communication classique. Il sera sûrement submergé d’un flux important de messages à un moment donné. Le filtre ou le système de tri s’impose pour mieux traiter toutes les lettres reçues. Cela exige à l’équipe qui s’en charge une grande compétence et un niveau de technicité.
Fortes valeurs ajoutées
L’interface « Iavoloha- public » présente un certain nombre d’avantages. Entre autres, elle évitera à coup sûr à beaucoup la fastidieuse demande d’audience et le rituel de l’attente ennuyeuse dans l’enceinte du palais d’Etat le moment venu. Elle évitera également aux groupes mécontents ou frustrés les coûteuses campagnes de tapages médiatiques au sujet d’un tel ou tel cas délicat ou d’intérêt public nécessitant l’intervention d’un niveau supérieur. Manifestement, le format des messages est limité aux textes sans photos ni vidéo. La restriction est peut-être d’ordre sécuritaire lié à la prévention de la cyber-attaque. Quant au contenu, aucune instruction n’est indiquée. Que ce soit seulement sérieux, pertinent, fondé… et à fortes valeurs ajoutées au profit du développement et la croissance inclusive. Par ricochet, les dénonciations, avec des preuves irréfutables, des abus, des agissements, des cas de corruption avérés… des hauts responsables peuvent y passer. Sous cet angle, l’interface se substitue aux traditionnels « RG », un service normal dans le fonctionnel normal d’un Etat. A nos claviers alors les citoyens qui se respectent et respectueux aussi !
Manou Razafy