Question : Insinuez-vous une sorte de consensus national ?
Haingo Rasolofonjoa : Pourquoi pas par exemple ? D’ailleurs, sans le dire ouvertement, le Président de la République a déjà adopté cette méthode en ratissant large dans la mise en place du Gouvernement. Le monde économique en général a accueilli favorablement ce premier pas important du Président de la République. Quand je parle de consensus, cela n’a rien à voir avec les complaisances malsaines de la politique politicienne de distribution des sièges. Je parle plutôt d’une capacité d’écoute de la majorité au pouvoir et d’une fluidité des débats avec les camps d’en face.
Les gens avertis savent très bien que l’IEM est une nouvelle philosophie de développement national avec un défi colossal en package globalisant qui brûle les étapes et se positionne dans l’antipode de la vieille école soumise aux étapes contraignantes des transferts des capitaux des institutions financières traditionnelles et au système des priorisations en termes sectoriels. Je crois que Madagascar, avant cette mise en œuvre de l’IEM a déjà observé suffisamment les expériences des autres pays d’Afrique pour pouvoir sagement éviter leurs écueils. Imaginez les bouleversements socioculturels qui accompagnent la transformation rapide de l’environnement ou du visage urbain par exemple. Il y aura certainement une autre forme de perte de repère. Si on ne prend pas dès maintenant les éventuelles mesures d’accompagnement, on risquera de favoriser une autre fracture sociale plus douloureuse par une éventuelle existence de développement à plusieurs vitesses. On ne doit pas faire le voyage d’une école à une autre mais on doit adopter des méthodes intermédiaires adaptables intelligemment aux réalités socioculturelles et économiques de la Grande île et en restant dans la déontologie et l’éthique des systèmes de coopération internationale.
Qu’on le veuille ou non, pour éviter ces éventuels accidents de parcours, on devra prendre des mesures pour humaniser l’ensemble des processus. C’est dans cette optique qu’on doit avoir l’implication de l’ensemble des acteurs de développement et des acteurs politiques. Il faut toujours accepter l’idée selon laquelle, une innovation, même celle qui va dans le bon sens, croise toujours dans sa mise en œuvre, l’esprit qui a peur de l’inconnu. Personnellement, je souhaite l’existence d’un véritable travail de sensibilisation dans différents niveaux. Je ne crois pas que durant les campagnes électorales, les gens ont vraiment saisi les véritables enjeux d’une politique de développement d’envergure.
Question : Personnellement, croyez-vous en l’avenir de l’IEM ?
Haingo Rasolofonjoa : Ce n’est plus à discuter. Par contre, il faut éviter la mauvaise intégration des acteurs nationaux en particulier et de la population en général dans l’ensemble du processus. C’est en négligeant cette politique de transparence, d’intégration et d’humanisation du processus et en bâclant la phase préparatoire que des pays d’Afrique rencontrent actuellement des difficultés sociales dans leur miracle économique. Au Rwanda par exemple, les usagers frappés par le système de péage sur les autoroutes se sentent étrangers dans leur propre pays et les genres des mesures pareilles mal expliquées au début du processus créent un véritable malaise social dans ce pays en ce moment.
Question : Comment faire coexister ce que vous appelez consensus national et pluralisme dans votre proposition ?
Haingo Rasolofonjoa : l’IEM en tant que programme politique de développement est une chose tandis que la mise en œuvre avec tous les paramètres qu’il faut gérer et les objectifs qu’il faut atteindre en sont une autre. L’IEM programme n’est plus discutable mais la mise en œuvre doit être un objet de véritables débats au niveau des Chambres parlementaires et des conseils des collectivités décentralisées.
Question : Si vous avez un souhait à partager ?
Haingo Rasolofonjoa : Qu’on ne fasse pas fausse route et que l’IEM soit le levier d’un vrai rêve de la population malagasy.
Propos recueillis par la rédaction