Publié dans Société

Témoignage - « Je me prostitue pour boucler les fins de mois »

Publié le mercredi, 24 mai 2023

Le salaire brut n’arrive plus à couvrir les dépenses pour de nombreux foyers avec la hausse constante des produits sur le marché à  Madagascar. C’est par ce constat qu’une mère de famille a décidé de basculer dans la prostitution en plus de son travail habituel.

Tout a été chamboulé quand le père de ses trois enfants a quitté le foyer pour une autre fille, fin 2022, laissant tous les charges sur cette mère. « Trois enfants qui vont dans une école privée, le loyer et les autres factures. Comment voulez-vous que mon salaire de 375 000 ariary arrive à couvrir tout cela », explique Chantal, nom d’emprunt.

Habitant dans un quartier près de l’université d’Antananarivo, cette maman de 42 ans a indiqué que le loyer de la maison est de 200 000 ariary par mois et les frais de scolarité des enfants cumulent à 150 000 ariary. Avant, cela n’était pas un problème vu que c’est le père qui prenait tout en charge et Chantal utilise son salaire pour la nourriture et les autres besoins à la maison.

Recherche d’emploi non fructueuse 

Avant de se lancer dans cette aventure, Chantal a déjà cherché d’autres sources de rentrée d’argent. Le call center d’abord, mais soit elle ne correspondait pas au profil recherché, soit c’est travailler la nuit alors qu’elle ne peut laisser ses enfants seuls à la maison sans surveillance. Elle a aussi essayé la vente de friperie, mais cela demande beaucoup de temps libre et son autre boulot ne lui permettait pas d’en tirer le maximum d’argent.

 « J’ai un bon travail, certes, la paie n’est pas élevée, mais la vie devient plus chère chaque jour. Rien que le loyer et les frais de scolarité bouffent la majorité de mon revenu mensuel. Pour le bien de mes enfants, après des recherches infructueuses de second boulot, j’ai opté pour la prostitution. Au début, j’avais un peu honte, mais au fil du temps, il faut s’y habituer tout en pensant que personne ne viendra t’aider. C’est mieux de s’en sortir toute seule sans dépendre des autres. Cela, je l’ai appris à mes dépens avec nom ex », lança-t-elle.

Le loyer est un peu cher, mais comme la maison compte plusieurs chambres séparées, je pratique le métier à l’abri des regards des enfants. En plus de la proximité de leur école, j’ai décidé d’y rester. Et si par malheur les enfants découvrent  ce que je fais, je leur expliquerai que le client est un ami qui était de « passage », mais va s’en aller bientôt.

Chasse aux hommes sur Facebook 

« Faire ce boulot n’est pas facile, mais tant pis comme on dit quand il faut y aller, il faut y aller. Tu t’en fous des ragots et des regards des autres. En plus, ce ne sont pas eux qui vont te tendre la main si tu es dans la m… n’est-il pas ? D’ailleurs, en te voyant t’épanouir et t’en sortir toute seule, il y a aussi les jaloux ».

Cependant, cette mère de famille s’impose quelques règles. Ainsi, elle ne reçoit pas plus d’un client par nuit et jamais au-delà de 22 heures et ne travaille pas le week-end consacré à ses enfants. L’utilisation de préservatifs est une condition sine qua non tant pis si cela fait perdre des clients.

Elle cherche ses clients sur les réseaux sociaux et y indique le prix de la passe (30 000 ariary) et ses conditions. Les photos qu’elle publie sur sa page ne sont pas non plus aguicheuses, mais des simples clichés de vêtements de tous les jours. « Cela plaît aux clients, c’est naturel et donne un air novice tout en étant digne de confiance », souligna-t-elle.

Un métier comme un autre 

D’après ses explications, la majorité de ses clients sont des hommes d’âge mur, de passage dans la Capitale, mais également habitant dans les quartiers voisins. Cela n’exclut pas les jeunes en quête de sensation forte avec une femme d’expérience.

« Depuis que je fais ce travail, j’arrive à joindre les deux bouts et je peux même me permettre d’économiser un peu. 600 000 ariary par mois en plus de mon salaire, c’est plus qu’inespéré pour moi ».

Dans un dernier conseil,  Chantal lance que la prostitution est un métier comme un autre. Celles qui y ont recours n’ont plus le choix même si quelques filles le font par caprice et pour ‘‘être tendance’’. Je dis bon courage à toutes les mères et les femmes qui font ce métier, et elles sont nombreuses dans mon cas. J’espère qu’en faisant ce témoignage, je leur redonne le courage et la fierté de faire ce métier pour leurs enfants.

 

Nikki Razaf

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Editorial

  • Et les taxis-bicyclettes ?
    Le conseil municipal de la Commune urbaine d’Antananarivo (CUA) offre un cadre légal aux taxi-motos à Tanà-Ville. Après avoir agi dans l’illégalité pendant au moins quatre ans, les professionnels de transport sur « deux-roues » ont finalement obtenu gain de cause. Les mesures de confinement décrétées en raison de la pandémie de Covid 19 en 2020 donnaient naissance à un nouveau mode de transport de passagers et de bagages plus pratique. Les transports en commun, pénalisés par les codes de conduite sanitaires, devaient céder la place aux déplacements individuels. La mesure implacable de confinement empêchant de se déplacer physiquement et en groupe donne lieu aussi à un nouveau mode de commerce : la vente en ligne et livrée à domicile.

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