Publié dans Dossier

Paysage économique de 2024 - Madagascar tiraillé entre défis, risques et opportunités

Publié le lundi, 01 janvier 2024



L'année 2024 s'ouvre sur un paysage économique empreint de défis et d'opportunités pour Madagascar. En scrutant les horizons des affaires et des investissements, il est crucial d'examiner les dynamiques du climat économique, les risques d'inflation et les mouvements de dépréciation de l'ariary. Cette nouvelle année sera caractérisée par une conjoncture où la stabilité monétaire et la compétitivité sur les marchés internationaux sont des enjeux majeurs pour l'économie nationale. L'analyse approfondie de ces éléments offre des perspectives éclairantes pour comprendre les tendances actuelles et les éventuelles orientations qui façonneront l'économie et les investissements à Madagascar en 2024.

Croissance économique

Le Projet de loi de Finances 2024 (PLF 2024) publie une perspective de croissance économique de l'ordre de 4,5 %, une évolution relativement stable par rapport à l'année 2023, initialement estimée à 4,5 % et ajustée à 4 %, selon le ministère de l’Economie et des Finances (MEF). Selon les prévisions du ministère, cette croissance modeste se traduirait par une augmentation de 4,4 % dans le secteur primaire à Madagascar. Le PLF présenté à l'Assemblée nationale révèle une croissance anticipée de 5,1 % dans le secteur secondaire et de 4,5 % dans le secteur tertiaire. Ces projections s'appuient sur une hausse prévue de 7,2 % dans les activités de l'industrie extractive, de 4,9 % pour le secteur textile, de 4,0 % pour le BTP, de 10,1% pour le tourisme, de 5,9 % pour le transport, et de 10,7 % pour le secteur des télécommunications.
Les réformes liées à la nouvelle loi sur les investissements, au nouveau Code minier, ainsi qu'à la refonte du cadre juridique et réglementaire du secteur des télécommunications pourraient potentiellement influencer ces prévisions. Dans le cadre du PLF 2024, l'Etat annonce la mise en service de 946 bâtiments scolaires, 122 centres de santé de base et 13 hôpitaux, tout en s'engageant à investir dans le capital humain et la protection sociale avec le recrutement de plus de 14.000 agents de l'Etat. Le projet de loi met en avant l'augmentation du rendement agricole, en particulier en ce qui concerne le manioc. Le Gouvernement vise à accroître la productivité par hectare du manioc en favorisant la disponibilité de variétés à haut rendement et en encourageant l'adoption de pratiques culturales adaptées au contexte du changement climatique.
L'objectif fixé est d'atteindre une production d’environ 7 millions de tonnes de manioc d'ici 2027. Parallèlement, l'Etat s'est engagé à atteindre une production de 6 millions de tonnes de paddy d'ici 2024.Une évolution significative attendue à travers l'orientation budgétaire de ce Projet de loi de Finances est la mise en place d'une nouvelle tarification pour les nouvelles ressources au profit des collectivités territoriales décentralisées, soulignant ainsi un renforcement continu de la décentralisation.
L'inflation en légère décélération, maintenue à 8,5 %
Dans un paysage économique en constante évolution, l'indicateur clé de l'inflation enregistre des signes de décélération à Madagascar, selon les récentes données fournies par l'Institut national de la statistique (INSTAT). Bien que le taux d'inflation reste relativement élevé à 8,5 %, cette légère baisse souligne des efforts pour maintenir la stabilité économique. Selon les informations dans la loi de Finances 2024, l'inflation a montré des tendances à la baisse tout au long de l'année 2023. De 12,4 % à fin mars, elle est passée à 11,4 % à fin juin, pour atteindre 8,2 % à fin septembre. Une évolution significative, mais les préoccupations persistent quant aux perspectives futures. L'INSTAT apporte des éclaircissements sur la stabilité actuelle du taux d'inflation. Selon ses récents calculs, le taux reste inchangé à 8,5 %, le même chiffre enregistré en septembre 2023.
Cette stabilité est attribuée à deux facteurs majeurs qui ont été mis en place pour contrôler l'inflation.Tout d'abord, le maintien du prix du carburant a joué un rôle essentiel dans la préservation de la stabilité des prix des biens de consommation et des produits de base. Cette mesure stratégique a permis d'éviter des fluctuations majeures dans certains secteurs, apportant ainsi une certaine prévisibilité à l'économie. Deuxièmement, la Banque centrale a récemment ajusté sa politique monétaire en augmentant le taux marginal de crédit. Cette décision a eu pour effet de réduire la masse monétaire en circulation, élément clé dans la gestion de l'inflation. Les résultats combinés de ces mesures ont contribué à maintenir le taux d'inflation à 8,5%.
L'INSTAT prévoit même une légère baisse supplémentaire, anticipant un taux d'inflation à 8 % d'ici mars 2024. Ces estimations reposent sur une analyse approfondie des tendances actuelles et des politiques mises en place, démontrant ainsi l'engagement continu envers la stabilité économique. Cette décélération de l'inflation reflète les efforts concertés du Gouvernement et des autorités financières pour assurer la viabilité économique à long terme de Madagascar. La population et les acteurs économiques peuvent ainsi se projeter avec une certaine confiance dans un avenir économique plus stable.

Dépréciation de l'ariary
La monnaie nationale, l'ariary, continue de faire face à des défis économiques majeurs, perdant de la valeur par rapport à l'euro et au dollar. En fin décembre 2023, elle a atteint un niveau record de 5.047 ariary par rapport à l'euro. Le dollar, quant à lui, s'échangeait à 4.572 ariary, un chiffre alarmant qui contraste avec les 60 années d'histoire de la monnaie nationale. Selon la loi de Finances 2024, la dépréciation de l'ariary en 2022 a dépassé 12,8 % par rapport au dollar américain et 5,8 % par rapport à l'euro. Cette situation est attribuée à la persistance des chocs extérieurs, notamment le conflit russo-ukrainien, qui a maintenu le marché dans une incertitude persistante. La dépréciation de l'euro par rapport au dollar sur le marché international a également joué un rôle important, passant de 1,1334 dollar à fin 2021 à 1,0666 dollar à fin 2022.
Au cours des neuf premiers mois de 2023, l'ariary a continué de perdre de sa valeur, enregistrant une dépréciation de 1,1 % par rapport à l'euro et de 1,2 % par rapport au dollar. La parité EUR/USD a également diminué, passant de 1,0666 à fin décembre 2022 à 1,0594 à fin septembre 2023. Les conséquences de cette dépréciation progressive se font déjà sentir sur la consommation, en raison de l'écart significatif sur le taux d'inflation. Madagascar, étant largement tributaire des importations, se trouve confronté à des défis économiques majeurs. Les produits de première nécessité tels que le riz, l'huile et le sucre sont principalement importés, et les tensions géopolitiques mondiales, en particulier le conflit russo-ukrainien, n'ont fait qu'aggraver la situation. Les autorités économiques malagasy prévoient une quasi-stabilité de l'ariary au cours des trois prochaines années, jusqu'en 2026, selon la loi de Finances 2024. Ces prévisions se basent sur les taux de change anticipés, prenant en compte les résultats jusqu'à fin octobre 2023 et les calculs du ministère de l'Economie et des Finances. Cependant, la route vers la stabilité semble semée d'incertitudes, et la population redoute les impacts continus sur le coût de la vie et la consommation quotidienne.
L'année 2024 se profile comme une période décisive pour le pays, combinant défis persistants et opportunités émergentes dans le paysage des affaires et des investissements.

Stabilité politique et économique avant tout
Après une période de transitions politiques, Madagascar a stabilisé son Gouvernement, offrant une atmosphère politique relativement calme. Cependant, des défis socio-économiques subsistent, notamment en matière de développement des infrastructures, d'accès à l'énergie et de lutte contre la corruption. Les efforts pour améliorer la gouvernance économique restent cruciaux pour attirer les investisseurs.

Des réformes structurelles en cours
Le Gouvernement malagasy s'est engagé dans des réformes structurelles visant à améliorer le climat des affaires. Des initiatives pour simplifier les procédures administratives, renforcer l'Etat de droit et garantir une plus grande transparence dans les transactions commerciales ont été amorcées. Ces mesures sont essentielles pour stimuler la confiance des investisseurs.

Les secteurs clés d'investissement
L'agriculture, l'industrie extractive, le tourisme et les nouvelles technologies sont parmi les secteurs qui suscitent un vif intérêt. Madagascar possède des ressources naturelles diversifiées, un sol fertile et une biodiversité exceptionnelle, offrant des opportunités d'investissement dans l'agriculture, l'exploitation minière responsable et l'écotourisme. De plus, le secteur technologique connaît une croissance prometteuse grâce à l'innovation et aux jeunes talents malagasy.
« Nous sommes témoins d'un dynamisme croissant dans le tissu entrepreneurial malagasy. Les jeunes entreprises se développent, s'appuyant sur l'innovation et la créativité pour contribuer à l'économie nationale », a témoigné Lala Rakotomalala, fondatrice d'une startup spécialisée dans l'agroalimentaire.
Par ailleurs, Madagascar cherche à renforcer ses partenariats internationaux pour soutenir le développement économique. La collaboration avec des institutions financières internationales et la participation à des accords commerciaux régionaux ouvrent des portes pour attirer des financements et favoriser l'intégration économique mondiale.
« Nous avons constaté une nette amélioration dans le processus d'obtention des autorisations et la clarté des réglementations, ce qui nous a encouragés à envisager de nouveaux investissements à Madagascar », a déclaré un entrepreneur étranger, PDG d'une entreprise de technologies durables.
Malgré toutes ces opportunités, des risques persistent, notamment en matière de stabilité sociale, de volatilité politique et de fragilité des infrastructures. La situation climatique précaire dans certaines régions du pays, exposées aux cyclones et à d'autres phénomènes météorologiques extrêmes, constitue également une préoccupation majeure pour les investisseurs.
En ce début d'année 2024, Madagascar se positionne comme une destination d'investissement prometteuse. Les élections récentes ont consolidé la stabilité politique, offrant ainsi une base solide pour la croissance économique.
« Nous sommes enthousiastes quant aux opportunités offertes par Madagascar en termes d'énergies renouvelables. Les politiques gouvernementales favorables et les ressources naturelles disponibles représentent un fort potentiel pour nos investissements futurs », a affirmé Tiana Rajaonarison, entrepreneure malagasy dans le secteur des énergies propres.
En somme, Madagascar affiche un potentiel économique considérable pour les investisseurs. Les perspectives pour 2024 sont encourageantes, mais le pays doit poursuivre ses réformes, renforcer la stabilité politique et améliorer l'environnement des affaires pour capitaliser pleinement sur ses atouts. Cette année qui vient de débuter sera marquée par une dynamique où défis et opportunités coexistent, offrant aux investisseurs avertis la possibilité de contribuer au développement durable et à la prospérité de Madagascar. En effet, malgré les défis persistants, Madagascar s'affirme comme un marché attractif pour les investisseurs, offrant un potentiel considérable pour ceux qui cherchent à contribuer au développement économique, tout en bénéficiant de la richesse naturelle de l'île. L'année 2024 s'annonce pleine de promesses, portée par un optimisme partagé tant par les entrepreneurs locaux que par les investisseurs étrangers, tous désireux de participer à l'essor économique de la Grande île.
Dossier réalisé par Hary Rakoto et Carinah Mamilalaina


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Editorial

  • Quid d’une volonté politique
    En panne d’une réelle volonté politique, la lutte contre la corruption fait du surplace à Madagasikara.Un décalage flagrant s’interpose entre ce qui a été dit et ce qui est fait ! Le pays stagne. Les Indices de perception de la corruption (IPC) éprouvent les peines du monde d’évoluer vers le sens du positif. Plutôt, ils reculent. Quid d’une volonté politique pour cerner ce « mal », la corruption, qui sape le fondement de l’essor de l’économie nationale.Créé le 17 décembre 2004, le Bureau indépendant anti-corruption (BIANCO) fête ses 20 ans d’existence. Immédiatement, la question qui surgit : « quel bilan ? » BIANCO, de par son nom, ambitionne de combattre la corruption à Madagasikara. Après 20 ans, où en sommes-nous ?D’un avis généralement partagé, on hésite. Ecartelée entre une appréciation tranchée de réussite et d’un constat amer d’échec, l’opinion publique vague à l’âme. Le bilan mitigé semble dominer la partie.…

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