D'abord pour le mari, c'est l'une des travailleuses qui l'avait dénoncé à la police, après le rapatriement de celle-ci. C'est donc Nantenaina qui se charge du recrutement, mais aussi de formalités nécessaires au voyage telles que le visa ou le billet d'avion. Mais surtout, il affirme bénéficier de l'aide d'un médecin retraité pour les visites médicales, mais aussi de l'une de ses relations à la police de l'air et des frontières. Depuis son box d'accusé hier, Nantenaina a tout avoué. « J'agissais comme une agence de placement informelle pour relier notre antenne au Koweït. Nous avons perçu 600$ par fille. J'ai contacté les candidates au voyage par le canal d'un groupe de publications basé à l'extérieur sur les réseaux sociaux. Celles qui désiraient partir me contactent ensuite par téléphone deux semaines après notre premier contact sur Facebook », confie-t-il au juge.
A la question de celle-ci à propos de sa grande responsabilité sur les dérives dont les travaux forcés ou la prostitution que leurs employeurs arabes ont fait subir à ces jeunes femmes malagasy, une fois au pays du Golfe, Nantenaina répond avec calme ; « Madame, je les ai aidées à partir là-bas pour qu'elles puissent travailler comme des femmes de ménage au Koweït, non point pour se prostituer. Cet emploi que nous leur avons promis se trouve d'ailleurs dans le contrat. Donc, une fois que ces filles sont au Koweït, j'ignorai totalement ce qu'elles ont réellement fait là-bas », explique-t-il. Et de poursuivre : « Nous étions dans le besoin. Or, il a fallu assumer le traitement de mon père malade et diabétique. Cet argent nous a permis de le faire », affirme encore l'accusé. Ce à quoi, la présidente de la Cour n'a pas manqué de remarquer qu'avec ces dollars que le couple a gagnés, le couple ment de n'avoir envoyé qu'une trentaine de filles au Koweït. La juge accuse les époux simplement de faire de la traite d'êtres humains. « Avec 4500$ perçus l'année, cela ne suffit pas à couvrir ce traitement comme vous prétendez. Donc vous mentez ; Il vous a fallu envoyer davantage de filles », rétorque la présidente.
Quant à l'épouse, elle accepte d'avoir envoyé ces travailleuses ayant entre 21 et 29 ans, et qui sont originaires de villes comme Antsirabe, Fianarantsoa ou Antsiranana au Koweït pour qu'elles y travaillent comme des domestiques. « Je nie formellement les avoir aidées à partir pour qu'elles s'y prostituent », clame Gabriella. Devant la question du juge qui lui a demandé si l'accusée était en connaissance de cause ou non, que ces voyages sont interdits par la loi en vigueur, la concernée répond : « Je ne le savais qu'en 2017 ! », lâche-t-elle. « Et pourtant, vous avez continué à le faire en 2018 ! », note la présidente de la CCO à son endroit.
Sans la complicité de passeurs basés dans la Capitale, ces immigrations honnies et punies par la loi en vigueur, n'auraient jamais dû exister.
Le problème, c'est que les séjours des jeunes malagasy dans des pays comme l'Arabie ou le Koweït furent souvent un véritable calvaire : travaux forcés, maltraitance, agressions sexuelles ou autres sévices, barbarie pure et simple, toxicomanie qui se termine souvent par la folie de la victime .D'où le farouche combat mené par le pouvoir actuel pour traquer les passeurs locaux et leur complicité à l'étranger.
Franck R.