Tel est le résultat d'une opération conjointement menée l'équipe de la Direction régionale de l'environnement et du développement durable (DREDD) Atsinanana et les Forces de l'ordre. L'article paru dans ce journal du 19 avril dernier ayant relaté la persistance des trafics des produits forestiers sur le canal, impliquant parfois des responsables locaux, a fait réagir la ministre de l'Environnement et du Développement durable Marie-Orléa Vina.
Les activités illicites menacent la survie de la forêt classée de Vohibola. Gérée par l'association Razan'ny Vohibola, celle-ci est le vestige du couvert forestier naturel du littoral Est de Madagascar et abrite ainsi une très riche diversité biologique. Par exemple, les plus petites espèces de grenouille et de caméléon de la planète ne vivent nulle part ailleurs que dans cette forêt. Ce trésor naturel unique au monde est donc à protéger absolument.
Pièce maîtresse
Mais la forêt classée de Vohibola est la proie facile des trafiquants avides d'argent facile. Sa superficie continue ainsi de se réduire malgré les activités de conservation et de restauration dont se charge l'association Razan'ny Vohibola. Les trafiquants y sévissent à longueur d'années à leur guise. Outre le charbonnage et la coupe illicite de bois, les envahisseurs chassent aussi les animaux sauvages rares comme les lémuriens.
« Tous les jours, toutes les nuits, pendant les cyclones, pendant les pleines lunes, sous la pluie, avec des vents de dingue, rien ne les arrête. Ils sont libres. Aucun contrôle des autorités ? », s'offusque Stéphane Decampe, l'époux d'Angélique Decampe, présidente de l'association, tel qu'il a été rapporté dans ce journal la semaine passée.
Selon la loi, l'administration forestière, les associations à la base et les Communes sont tenues de collaborer pleinement pour la réussite de la conservation et des aires protégées. L'appareil judicaire, par la punition des gens trouvés coupables d'infraction environnementale avérée, devrait être la quatrième pièce maîtresse du puzzle pour sauver le peu qui reste de la forêt.
Sans aucun papier
Pour le cas de Vohibola, son gestionnaire et les autorités communes d'Ambinaninony, la Commune dans laquelle se trouve la forêt, s'accusent mutuellement. L'une suspecte l'autre partie de manœuvre destructrice de la forêt et vice-versa. La lecture de l'article de La Vérité a poussé la ministre à donner l'ordre de faire le nécessaire pour stopper le trafic.
« Les deux parties ont été convoquées pour être entendues à notre bureau afin de savoir où se trouve la racine du mal. Elles ont été photographiées et filmées », a révélé Armando Lionel Tezena, le DREDD d'Atsinanana. Tout a été bien noté sur des procès-verbaux.
La suite en est la descente massive sur le terrain dans le but d'y effectuer un ratissage complet, enquêter des villageois et de contrôler le barrage au niveau du passage obligé à Topiana. Deux équipes ont été déployées pour ce faire. En effet, cinq bateaux ayant voyagé de nuit et chargés de bois sans aucun papier y ont été interceptés mardi.
« Il s'agit d'une double infraction. Les bateaux ne peuvent pas naviguer la nuit. Mais ils l'ont fait parce qu'ils n'ont pas de papier du tout concernant les produits forestiers à bord dont la circulation nocturne est interdite par la loi », a souligné le responsable ministériel. L'enquête est immédiatement ouverte. Quant aux vrais trafiquants et les commanditaires, des noms sont déjà connus.
D'autres endroits
Le Canal des Pangalanes est une vraie autoroute dont la présence est vitale pour l'économie des Communes, Districts et régions desservis. Tous les produits ramenés de loin dans la brousse y passent. La note ministérielle datée de janvier 2019 interdisant la coupe, le transport et la commercialisation des essences forestières est toujours de rigueur. Pourtant, les bois de catégorie 5 ne sont pas concernés.
La forêt de Vohibola a le malheur de se trouver sur les rives de cette voie fluviale. « On ne sait pas si les bois et les sacs de charbon illicites à bord des bateaux interceptés proviennent de cette forêt ou non. Ils peuvent provenir d'autres endroits. En tout cas, les marchandises sont illégales », a insisté Armando Lionel Tezena. Aux dernières nouvelles, deux autres bateaux en infraction ont été, mercredi soir, arrêtés au même endroit du barrage de Topiana.
Du coup, l'Agence portuaire, maritime et fluviale (APMF) doit aussi prendre sa responsabilité. Comme les voitures en infraction, les embarcations ne respectant pas les régulations en vigueur devraient être durement punies. La loi prévoit le retrait définitif des permis de naviguer si besoin en sus d'une éventuelle poursuite pénale.
M.R.