Vous êtes à la fin de votre mandat à Madagascar, comment voyez-vous ces quatre années au service de la population malagasy ?
Issa Sanogo (I.S) : En effet, cela fait presque quatre ans que je travaille à Madagascar. Je suis arrivé en décembre 2020 en pleine période de la covid 19. La gestion des crises humanitaires et sanitaires ainsi que le renforcement de la résilience de la population constituaient la priorité des priorités.
L’élaboration et la réalisation des plans- cadres de coopération 2021 - 2023 et 2024 -2028 avec leurs quatre priorités stratégiques relevant de la gouvernance, du capital humain, de l’économie et de l’environnement ont marqué cette période. Nous continuons avec ces quatre priorités stratégiques pour la période 2024-2028 en appuyant les efforts du Gouvernement pour le développement durable.
Au cours des 3 dernières années, les Nations unies ont changé leur approche en adoptant une approche intégrée afin d'apporter une solution plus durable notamment dans le Grand Sud et Sud- est de la Grande île.
Grace aux efforts des agences des Nations unies et leurs partenaires dans l’intensification de l’assistance humanitaire pour la sécurité alimentaire et la nutrition, cette année 2024, aucun District n'a été classé comme faisant face à une urgence nutritionnelle, par rapport aux années précédentes.
Cependant, la lutte contre les impacts du changement climatique à long terme nécessite plus que la seule aide d’urgence. La résilience est la solution. Construire une plus grande résilience aux effets des sécheresses et prévenir l’impact du changement climatique sont la meilleure solution durable.
Madagascar est l’un des 30 pays choisis par le secrétaire général des Nations unies pour le renforcement du système d’alerte précoce en anglais « Early Warning for All » qui a présenté son plan d’action national à la COP28. Un soutien à la mise en œuvre de ce plan est nécessaire pour réduire les besoins humanitaires à l’avenir et soutenir l’effort déployé pour la prévention.
Enfin, l’approche multisectorielle est bénéfique pour la population locale. Lorsque les agences des Nations unies travaillent ensemble, nous pouvons obtenir de meilleurs résultats et plus d’impacts.
Quels sont les héritages que vous allez laisser après ces quatre années de service ?
I.S : Depuis 2022, Madagascar a lancé l’approche Humanitaire Développement et Paix avec un programme de résilience en perspective et qui sera opérationnalisée cette année avec les 8 zones de convergence dans le Sud et dans d’autres Régions comme Itasy et Vatovavy.
L’héritage que nous allons laisser, nous l’avons bâti autour des valeurs des Nations unies : la paix, les droits humains et le développement ainsi que l’inclusion, l’intégrité, l’humilité et l’humanité.
Nous avons recruté plus de jeunes et encouragé leur participation ; donné des opportunités aux personnes handicapées ; appuyé les initiatives des femmes en particulier les femmes leaders et entrepreneurs ; introduit le module avec des orientations sur le stress au travail ; commencé à être des membres du staff responsables pour faire face au changement climatique avec le reboisement ; introduit le passeport de prévention contre les exploitations et les abus sexuels et enfin nous avons pu faciliter la collecte de connaissances et de données à travers UN Info , un outil de collecte de données.
L’analyse prospective, le bilan commun du pays, l’analyse intitulée “qui est laissé de côté à Madagascar” constituent des outils de référence pour la mise en place et l’amélioration des stratégies pour le développement durable de Madagascar.
Un aspect qui a également des impacts concerne le respect des droits humains. Nous avons développé des programmes de lutte contre toutes les formes de violence à l’encontre des personnes atteintes d'albinisme. Nous avons également fait de nombreux plaidoyers pour améliorer les conditions d’incarcération dans les prisons de Madagascar ainsi que l’accélération des procès notamment pour de simples délits et pour les mineurs suivant les recommandations et les mécanismes internationaux des droits humains. Enfin, pour faire face aux nombreux actes de violence envers les filles, les jeunes femmes et les femmes, nous nous sommes engagés plus avec l’initiative Spotlight pour combattre les violences basées sur le genre. Et nous sommes ravis d’annoncer le premier engagement de l’ONU Femmes avec une présence sur le terrain. Nous espérons que nos efforts ne seront pas vains et que toutes nos initiatives et nos engagements apportent leurs fruits.
Quel est votre message à l’endroit de l’Etat et du Gouvernement malagasy ainsi que les partenaires ?
I.S : Le Système des Nations unies à Madagascar est engagé avec le Gouvernement, le secteur privé, la société civile, les médias, les universités, les jeunes et la communauté avec l’appui des Partenaires techniques et financiers pour répondre aux besoins et priorités nationaux tout en considérant les six transitions permettant l’accélération des objectifs pour faire avancer l’agenda 2030.
Je voudrais réitérer mes remerciements à l’Etat et au Gouvernement pour la collaboration étroite qu’ils ont manifestée afin de permettre aux agences des Nations unies à contribuer à l’amélioration des vies de la population cible.
Je voudrais toutefois insister sur trois aspects. D’abord, la paix car sans la paix il n’y aura pas de développement. J’encourage la mise en place des espaces de dialogues garants de la stabilité, de la cohésion sociale et de la participation de tous les acteurs au développement. Ensuite, la bonne gouvernance, incluant la transparence et la lutte anti-corruption. Il faut continuer les efforts entamés dans ce sens pour une meilleure appropriation de la population. Et enfin, l’accessibilité. La construction et la réhabilitation des routes facilitent l’extension des projets ainsi que les échanges qui renforcent la dynamique de développement locale.
Je voudrais terminer en lançant un appel à tous nos partenaires et donateurs à renforcer notre coopération et d’appuyer les efforts des Nations unies pour accompagner Madagascar dans son développement afin d’améliorer les conditions de vie des populations notamment les plus vulnérables.
Ensemble, nous pouvons aider la population à se relever et à faire face aux différents défis tout en promouvant le respect des droits humains, en consolidant la paix, garante du développement durable.