Publié dans Politique

Monastère de Mahitsy - Au cœur du silence bénédictin

Publié le lundi, 24 novembre 2025

A  Ambohimanjakarano Mahitsy, le temps semble s’écouler différemment. La prière et le travail se répondent comme un lent balancier. Dans la montagne, au milieu des sapins, le monastère offre un refuge pour ceux qui cherchent la paix intérieure, mais aussi un témoignage vivant de simplicité, d’humilité et d’abandon. Dans le silence, les moines poursuivent leur œuvre, loin du monde mais profondément ancrés en lui, fidèles au triple appel de leur vie : prier, lire et travailler.

« Ora, lege et labora »  prier, lire et travailler. La vieille formule latine, héritée de la tradition bénédictine et cistercienne, résume avec sobriété la vie qui se déroule au monastère Masina Maria Ambohimanjakarano, perché à 1 500 mètres d’altitude, tout près de Mahitsy. Ici, loin de l’agitation de la Capitale, la prière ouvre chaque journée et en rythme le moindre instant. Ce n’est pas un hasard si le terme ora ouvre la triade : pour les moines, la prière est le cœur battant, la première respiration.

On prend la route nationale 4, arrivé à Mahitsy, vers  trente-cinq kilomètres d’Antananarivo, on tourne à droite pour prendre la route des œufs, la route d’Antanetibe Mahazaza. Entièrement réhabilitée entre 2018 et 2021, cette voie en parfait état serpente sur près d’une dizaine de kilomètres  en desservant les villages réputés pour l’élevage de poules pondeuses. Chaque jour, des milliers d’œufs prennent ce chemin vers la Capitale. Après la bifurcation vers Antanetibe Mahazaza, un panneau annonce : « Monastère Masina Maria Ambohimanjakarano – 800 m ». Un chauffeur originaire du coin sourit : « C’est juste derrière la colline. »

En réalité, la montée semble un peu plus longue. Le paysage, lui, en efface la distance : un ruban de sapins majestueux, une route secondaire cahoteuse mais bordée d’arbres, et un calme qui s’installe peu à peu,  la lumière glisse entre les branches, et le silence s’installe avant même d’arriver au sommet.

 

Au bout d’un quart d’heure d’ascension, les toits du monastère apparaissent, entourés de jardins entretenus avec soin. A l’entrée, un petit magasin tenu par un frère propose icônes, ouvrages spirituels et objets religieux, notamment ceux liés à Saint Benoît. En empruntant l’escalier principal, on passe devant la statue du patron du monachisme occidental avant d’atteindre la chapelle, située sur la gauche. A droite, un couloir dessert des salles, des bureaux et les chambres destinées aux visiteurs. En face des bureaux et accueil se trouve la salle à manger réservée aux hôtes, un hall, des escaliers menant aux étages et, en contrebas, un jardin planté d’arbres et de chalets qui accueillent les retraitants en quête de silence.

 

Fondé en 1954 par les moines de l’abbaye de Pierre-qui-Vire, le prieuré a célébré sa première messe le 15 août 1955. Aujourd’hui, une vingtaine de moines et quelques prêtres y mènent une existence rythmée par la liturgie des heures et par ces 7 rendez-vous quotidiens que sont les Vigiles (ou Matines), Laudes, Tierce, Sexte, None, Vêpres, Complies. A Ambohimanjakarano, les offices commencent à 5 h, puis se poursuivent à 6 h, 8 h 30, midi, 14 h, 17 h 30 et 19 h 30. Chaque communauté aménage ses propres horaires, mais la règle demeure : sept prières par jour, un souffle régulier qui structure la vie des frères. Vêtus de la coule beige serrée par une ceinture,  capuchon pointu sur les épaules et sandales aux pieds, ils avancent en silence dans le cloître, sans échanger un mot, seul le froissement de leurs robes monastiques brise le silence.  Les rares demandes se font en langage muet. Ici, chaque geste, chaque pas, est une offrande.

 

Au-delà de la prière, la vie monastique repose sur la lecture spirituelle, les études ainsi que le travail. Les bénédictins ne vivent ni de dons ni de subventions. Tout ce qui permet l’autosuffisance de la communauté est produit sur place, conformément à la Règle de Saint Benoît, qui fait du travail un acte d’humilité, de détachement et de fidélité à Dieu. L’élevage de poules pondeuses occupe une place importante et le monastère est d’ailleurs à l’origine du développement de cette filière dans la région. Jusqu’à deux mille œufs sortent chaque jour du prieuré et trouvent immédiatement preneur. Les frères élèvent également des vaches laitières, cultivent leurs jardins potagers, exploitent leurs forêts et gèrent l’hébergement ainsi que la restauration des visiteurs. Il leur arrive d’employer des journaliers lorsque les tâches deviennent trop lourdes, mais le plus souvent, chaque moine se voit attribuer une mission précise : traite des vaches, soins aux poules, maraîchage, lessive, repassage, préparation des repas ou entretien des bâtiments. Tout se fait en silence, comme une prolongation naturelle de la prière.

 

Les visiteurs qui viennent pour une retraite, un temps de prière ou simplement un moment de repos partagent ce quotidien simple, à une nuance près : s’ils prennent leurs repas séparément des moines, ils nettoient et lavent eux-mêmes leur vaisselle. Les frères, eux, mangent en silence. Seul le frère chargé de la bénédiction lit à haute voix les Écritures ou un texte spirituel, pendant que les autres prennent leur repas en écoutant. La lecture tourne chaque jour, comme un service offert à la communauté.

 

Devenir moine est un long chemin de discernement. Le candidat doit être titulaire du baccalauréat, avoir reçu tous les sacrements de l’Eglise catholique et présenter une lettre de recommandation de son prêtre. Il passe d’abord quinze jours au prieuré afin de s’imprégner du rythme monastique. Les supérieurs observent discrètement sa capacité à entrer dans cette vie exigeante. S’il est jugé prêt, il est rappelé pour un séjour de trois mois durant lequel il découvre en profondeur la réalité de la vie bénédictine. Ensuite viennent le postulat, le noviciat qui peut durer jusqu’à deux ans, les vœux temporaires puis les vœux solennels. 

Beaucoup de jeunes sont attirés par la vie monastique, mais peu persévèrent. Certains pensent qu’ils pourront devenir prêtres par la suite, d’autres espèrent retrouver un mode de vie plus libre. La réalité est toute autre. Le moine bénédictin demeure dans son monastère jusqu’à sa mort, et c’est dans le cimetière du prieuré qu’il est inhumé, non dans le tombeau familial. La séparation avec la famille est souvent l’épreuve la plus difficile. Après chaque étape de discernement, le postulant retourne chez lui une dizaine de jours pour réfléchir, dialoguer avec ses proches et choisir, s’il le souhaite, un nom de saint qui deviendra son nom de moine. Une fois engagé, il ne peut contacter sa famille que dans des cas exceptionnels et toujours avec l’autorisation du supérieur. La consultation de la Règle de Saint Benoît est recommandée pour tout acte inhabituel ou toute décision importante.

 

En tout cas, ceux qui cherchent la sérénité, qui souhaitent prier dans le calme ou simplement se reposer trouvent leur bonheur à Ambohimanjakarano, chez les moines bénédictins. Le monastère accueille tout le monde, quels que soient la religion, l’âge ou l’origine. Il est toutefois conseillé d’appeler à l’avance, surtout pour les groupes et durant les périodes de vacances, car il affiche souvent complet.

 

R.L. 

 

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  • Double test !
    Selon le programme établi et publié à la presse, il y aura ce jour du lundi 15 décembre un premier face-à-face officiel entre les députés et les membres du Gouvernement. Une première séance officielle de « questions – réponses » entre les parlementaires de l’Hémicycle et les ministres et cela en vertu de l’art. 102 de la Constitution précisant le cadre global du rapport entre l’Assemblée nationale et le Gouvernement, entre les membres du Législatif et ceux de l’Exécutif.

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