A six jours de la fête de Noël, l’ambiance festive manque au rendez-vous à Antananarivo. Les lumières et décorations scintillantes restent absentes dans la ville, tandis que les animations et ambiances de fête semblent timides par rapport à l’année dernière. Les commerçants se plaignent de cette situation. Les ménages, quant à eux, se serrent la ceinture pour survivre après la récente situation de crise…
Reportage réalisé par Anatra R., Carinah M. et Patricia R.
La ville des mille privée de décorations
A quelques jours de la fête de la Nativité, la ville d’Antananarivo reste dépourvue de toute décoration. Habituellement, à l’approche des fêtes de fin d’année, la Capitale se pare de lumières, de décorations scintillantes ainsi que d'animations musicales, offrant aux habitants et aux visiteurs une véritable ambiance de festive. De nombreuses familles font le déplacement avec des enfants pour admirer les décorations et lumières qui illuminent les rues du centre-ville.
Parmi les lieux emblématiques figure Antaninarenina qui concentrait les décorations les plus spectaculaires. Les guirlandes et jeux de lumière attirent petits et grands. Pourtant, à une semaine seulement de la fête de Noël, cette effervescence semble avoir disparu.
Depuis la période de la pandémie de Covid-19, la Capitale n’avait jamais connu un Noël aussi discret. Les rues manquent d’illuminations, les animations se font rares et l’ambiance festive peine à s’installer. En parallèlement, d’autres Régions sont déjà pleinement plongées dans l’ambiance des fêtes. « L’ambiance de fête est quasiment absente, alors qu’il ne reste plus qu’une semaine avant Noël », se plaint un père de famille qui espère admirer les décorations dans la ville.
Beaucoup se demandent si cette situation est liée à une politique de restrictions budgétaires menée par l’Etat. « Les décorations lumineuses à Antaninarenina fait partie intégrante des traditions de Noël. Aujourd’hui, on se demande même s’il y en aura », confient certains habitants, déçus par ce changement soudain.
Face à ces critiques, les responsables au sein de la Commune urbaine d’Antananarivo apportent des précisions. Selon eux, la préparation est encore en cours. Les travaux d’aménagement du jardin d’Ambohijatovo seraient actuellement en phase de finalisation. Ce site a été désigné comme l’unique espace destiné à accueillir les décorations de Noël cette année. Reste à savoir si cette initiative suffira à recréer l’esprit de Noël tant attendu par les habitants d’Antananarivo. En attendant, la Capitale demeure plongée dans une atmosphère sobre, loin de l’effervescence festive qui faisait autrefois la fierté des gens lors des fêtes de fin d’année.
Le marché de la volaille au ralenti
Les fêtes de Noël et de fin d’année débutent doucement à Madagascar. Selon Mbola, épicière à Ankadikely-Ilafy, la période n’est pas très animée jusqu’à présent. « Les prix des produits de première nécessité n’ont pas beaucoup changé par rapport à l’an dernier, mais le pouvoir d’achat des consommateurs reste limité », a-t-elle ajouté. Par ailleurs, le marché de la volaille connaît un ralentissement. Une responsable au sein d’une entreprise dénommée « Vorona matavy Antsirabe sy vokatra an-drano eto Madagasikara » confirme cette tendance. Cette dernière explique que de nombreux clients souhaitent acheter, mais qu’ils sont freinés par la hausse du coût de la vie et les difficultés quotidiennes.
Par rapport à l’an dernier, le nombre de commandes a clairement diminué. « Avant, le pouvoir d’achat était meilleur et les clients n’hésitaient pas à acheter. Aujourd’hui, ils sont beaucoup plus prudents et réfléchissent davantage avant de dépenser. Cette prudence se reflète aussi dans les prix, qui ont légèrement augmenté », a ajouté la responsable. Toutefois, cette hausse ne vise pas à augmenter les marges des vendeurs, selon elle. « Elle résulte du coût élevé de l’alimentation, des soins et de l’entretien des volailles, ainsi que des problèmes liés à l’insécurité qui font augmenter les dépenses et les risques pour les éleveurs » a-t-elle expliqué. Ainsi, les clients aussi bien que les producteurs rencontrent des difficultés.
Les consommateurs subissent la hausse du coût de la vie et les éleveurs doivent faire face à l’insécurité et à l’augmentation des coûts. Les volailles moins chères, comme le canard, le canard musqué et le poulet, sont déjà largement vendues. En revanche, les volailles grasses restent disponibles pour ceux qui peuvent dépenser 35.000 ariary et plus, et seules les oies sont encore nombreuses sur le marché pour Noël et les fêtes de fin d’année. En cette période de fête, le canard se vend de 35.000 à 50.000 ariary, le canard musqué s’achète à partir de 35.000 à 70.000 ariary, le prix d’une dinde oscille de 80 000 à 150.000 ariary, et l’oie se vend de 60.000 à 150.000 ariary.
Budget limité au niveau des ménages
La morosité de l’ambiance festive en cette fin d’année se constate auprès des ménages, surtout ceux modestes. En fait, la plupart des familles ne disposent pas d’un budget spécifique pour les fêtes, notamment pour la Nativité. « Pour notre cas, nous avons ressorti le sapin et les décorations de l’année dernière, sans acheter de nouvelles pièces. Heureusement qu’ils sont encore en bon état », nous confie Rado A., fonctionnaire et père de famille modeste. Bon nombre de ménages ont fait pareil afin de limiter les dépenses.
« Nous avons expliqué aux enfants que le Père Noël ne passera pas cette année, après la récente situation de crise à Madagascar. Cela veut dire qu’ils ne recevront pas les jouets et cadeaux qu’ils ont commandés. Toutefois, nous allons les en acheter mais à titre symbolique. J’ai déjà repéré quelques jouets à moins de 10.000 ariary dans un magasin », témoigne Domoina C., téléconseillère et mère de 3 enfants. D’autres familles ont supprimé l’achat de vêtements et accessoires pour Noël, en privilégiant le menu festif : entrée, plat de résistance et dessert. « Pour les 24 et 25 décembre, l’année dernière, nous avons dépensé au total 150.000 ariary pour les vêtements, jouets et nourriture, mais ce budget sera réduit de moitié cette année, vu la situation actuelle. Ce sera également le cas pour la fin d’année et le nouvel an », résume Fanja R., femme au foyer.
Pour les familles aisées, les préparatifs des fêtes de fin d’année vont bon train, sans changement spécifique au niveau du budget. Quant aux ménages qui vivent dans une situation de précarité, les fêtes s’annoncent soucieuses, voire catastrophiques. La lueur d’espoir et la magie de Noël semblent absents...








