Elle exprime tout haut ce que les gens pensent tout bas. C’est pourquoi, de son point de vue, elle enregistre autant de succès. Depuis près d’un an et demi, le métier d'influenceur ou de créateur de contenus, comme elle préfère l’appeler, est devenu pour Antso Bommartin un travail à temps plein. Elle publie ainsi quotidiennement des statuts et vidéos sur des plateformes en ligne, à savoir Facebook et YouTube. Mais comme tout travail, être influenceur demande également de l’organisation et du savoir-faire, mais surtout de la créativité. A travers cette interview exclusive, elle nous dévoile les coulisses du métier d’influenceur à Madagascar.
La Vérité (+) : Comment se sont déroulés vos débuts dans le monde des influenceurs ?
Antso Bommartin (-) : Cela fait quatre ans que je suis influenceuse. En 2016, j’ai publié ma première vidéo. C’était un monologue assez basique, sans aucun montage, vu que je n’avais pas encore les moyens pour investir dans des matériels de qualité. Donc, j’ai utilisé mon téléphone. Cependant, ma vidéo a quand même fait le buzz avec 6 000 vues (C’était énorme en ce temps-là !). Mais cela fait un an et demi, ou presque que j’ai décidé d’en faire une source de revenus à part entière, en plus de notre service-traiteur Fête par Fête by Bommartin bien évidemment. A partir de là, j’ai investi dans une caméra professionnelle et j’ai travaillé mon montage. Sur ce point-là, je m’y connaissais d'autant plus que j’ai déjà travaillé durant un an chez RTA, entre 2010 et 2011. Aujourd’hui, j’essaie de sortir une vidéo par semaine.
(+) : Qu’est-ce qui vous a motivé à en faire un « métier »?
(-) : J’adore parler, discuter et animer. Dès mon plus jeune âge, j’étais en admiration devant Lilly, Christian et Rija Tahiana, des animateurs réputés de l’époque. Et je voulais en faire mon métier. Tout le monde disait que pour devenir animateur, il fallait faire un parcours de journalisme (Ce qui n’est pas toujours obligatoire, soit dit en passant !). Au fil du temps, j’ai découvert qu’il est aussi possible de faire des animations sur d’autres plateformes, et pas seulement à la télévision. Donc, je me suis lancée dans la production de vidéos. D’un autre côté, ce choix est aussi une revanche pour moi. Depuis que j'étais toute petite, mon entourage m’a toujours critiquée parce que pour eux, je suis trop bavarde. Selon les normes sociales à Madagascar, une fille doit être calme et silencieuse. (Donc, j’étais hors normes). Au fil du temps, ils m'ont donc contrainte à changer de personnalité. Mais en devenant influenceuse, j’ai pu démontrer que l'on peut tout faire en ayant du caractère et une pesonnalité. Il suffit juste d’en faire sa force, et ne pas se limiter aux normes imposées par la société.
(+) : Le métier de créateur de contenus rapporte-t-il ?
(-) : Sincèrement, même si nous n’avons pas eu notre service-traiteur, nous aurions pu « bien vivre ». Malgré les clichés, oui, il est désormais possible de gagner sa vie grâce aux réseaux sociaux à Madagascar. Certaines personnes affirment qu’être populaire sur Facebook, c’est comme être riche au Monopoly. Or, c'est une idée complètement fausse. Ces gens sont complètement à côté de la plaque (Je ne sais pas si ces gens ont bien réfléchi avant d’émettre ce genre de remarque). Pour ma part, je travaille aujourd’hui avec beaucoup de marques issues de secteurs très diversifiés. En tant que créateurs de contenus, nous vendons surtout les vues et les réactions. En fait, nous sommes comme les chanteurs, les artistes mais aussi les sportifs, et toux ceux qui bossent dans le domaine de l’influence. Il faut juste beaucoup de créativité pour que les abonnés soient plus réceptifs.
(+) : Quels sont les principaux inconvénients rencontrés dans le métier ?
(-) : Notre principal souci aujourd’hui est sur le plan administratif. Etant donné que ce genre d'activité est encore très récente à Madagascar, les influenceurs n’ont encore ni de statut précis ni de cadre réglementaire. Donc, nous pataugeons un peu. En tout cas, une agence est déjà mise en place pour faire le lien entre les marques et les influenceurs. Et c’est déjà un grand pas! L'un des problèmes que j’ai également vécu au cours des dernières années réside dans le fait que les paparazzis qui surveillent vos moindres faits et gestes existent aussi dans le pays. Au début, je ne voulais pas y croire mais après, quelqu’un a clashé mon style vestimentaire de la tête au pied. J’ai même retrouvé des « mêmes » de mes photos sur la toile. Une fois, j’ai juste posté une photo, et certaines personnes l’ont passée à la loupe pour trouver de quoi me critiquer. Au départ, j’étais sensible à tout cela. Ma créativité en a même été affectée. Mon audience a particulièrement chuté en cette période. Puis, je me suis ressaisie, et je ne prend plus trop au sérieux les remarques. Je fais quand même attention à ce que je poste. Tu peux dire les mêmes choses mais les spectateurs les verront différemment si tu publies un statut ou une vidéo.
(+ ) : Qu’en est-il des avantages?
(-) : Les avantages contrebalancent les inconvénients, et de loin. Les gens te reconnaissent plus. Les opportunités se multiplient, en même temps que les relations. On t’écoute davantage. On te fait facilement confiance. On t’invite à différents événements. Des personnes décident même de faire appel à nous juste parce que nous sommes les Bommartin, et ce, sans demander de dégustation. Même Aina Nomenjanahary, joueur des Barea, me connaît aujourd’hui (C’est trop bien !). Et je ne vous parle pas des trucs gratuits que nous recevons. Je l'avoue : mon mari était sceptique au début. Mais au fur et à mesure que le temps passait, il a fini par être convaincu par rapport aux nombreux avantages de ce métier. Dans tous les cas, il faut savoir que je suis comme tout le monde, je suis comme toutes ces personnes qui font des vidéos et partagent leur vie sur les réseaux sociaux.
Propos recueillis par Rova Randria