Publié dans Dossier

Débat autour de la réouverture des frontières aériennes - « La campagne de vaccination n'est pas un argument pour rouvrir »_« La fermeture ne freinera pas la pandémie »

Publié le vendredi, 11 juin 2021

Pour tous, 2021 devait signifier le retour à la vie normale. Mais les nouveaux variants du coronavirus sont de nouveau sortis et malheureusement, les avis sont partagés entre une réouverture totale des frontières et le renforcement des mesures déjà existantes pour protéger le pays des risques d'une reprise de la pandémie. Autant, tous les secteurs ont une reprise planifiée à différents stades, tandis que nous n'avons pas de visibilité sur la durée de la fermeture des frontières. Les points de vue se suivent mais ne se ressemblent pas sur les campagnes de vaccination et les sensibilisations sur le renforcement des mesures de sécurité sanitaire et des gestes barrières.

Professeur A. Infectiologue, spécialiste en santé publique

« Il faut plus de 10 ans pour éprouver la stabilité d'un vaccin. Il ne faut pas uniquement se fier à la campagne de vaccination comme argument à la réouverture des frontières »

Certes, du point de vue socio-économique, les impacts du confinement sont plus que considérables. Pourtant, il est important aussi de dire ce qui se passerait réellement si l'on envisage la réouverture totale des frontières vers l'extérieur. L'important est donc d'évaluer les impacts sanitaires avant tout car c'est surtout la vie de beaucoup d'êtres humains qui est en jeu. Par ailleurs, la maladie repart dans les pays qui ont réouvert leurs frontières. En tenant compte des nouveaux variants, on risquerait alors de provoquer une troisième vague au pays. D'ailleurs la question qui se pose est : « Ouvrir les frontières, mais avec qui ? » dans la mesure où le risque n'est jamais absent qu'importe la décision à prendre. Le risque est d'avoir des voyageurs qui transportent le virus. On ne doit pas oublier que, chez nous, les premières contaminations ont été des « cas importés ». De plus, tout le monde le sait, les mesures de précautions sont difficilement applicables. Depuis quelques semaines, on assiste à un recul de la maladie avec une baisse continue du nombre de cas positifs. L'ouverture des frontières pourrait sensiblement remettre cette tendance à la hausse. D'un autre côté, concernant les campagnes de vaccination actuelle, les procédés de fabrication sont souvent longs et complexes. En effet, il faut entre six à vingt-deux mois pour produire un vaccin. Et encore, la stabilité des vaccins actuels est encore remise en question dans la mesure où il faut se donner une bonne décennie pour produire un vaccin avec une stabilité déjà éprouvée. 70 % du temps de fabrication sont consacrés aux contrôles de qualité et de sécurité qui sont effectués à chaque étape de la fabrication. Mais même au moment de la mise sur le marché, la totalité des risques liés à un vaccin ne sont pas toujours connus. Des premières informations ont été réunies au moment des essais cliniques qui sont réalisés sur une petite partie de la population et dans des conditions bien définies. C'est pourquoi, lorsque le vaccin arrive sur le marché et devient disponible pour un plus grand nombre de personnes, il continue à être suivi et analysé en permanence compte tenu de l'évolution des connaissances et de leur utilisation dans la vie quotidienne. D'où la période de décennie nécessaire pour éprouver la réelle stabilité du vaccin.

J. Andrianarisoa, doctorante en communication à l'université d'Antananarivo

« Je suis contre l'ouverture des frontières parce que la situation actuelle me fait douter à tous les niveaux »

La situation sanitaire actuelle dans le pays est encore dans une précarité totale. Les chiffres sur la pandémie de coronavirus évoluent en effet positivement, sauf que beaucoup de personnes meurent encore chaque jour dans les « Fokontany » les plus défavorisés, en raison  de l'inaccessibilité aux soins. Et malheureusement, ils ne sont pas comptabilisés. C'est pour cette raison que je ne suis pas d'accord pour que le pays réouvre ses frontières aériennes. De plus, nous ne pouvons pas être sûrs et certains que toutes les personnes arrivant dans la Grande île soient tous vaccinées. Les risques d'une recrudescence de la pandémie de Covid-19 dans le pays sont encore considérables. Est-ce-que toutes nos infrastructures sont performantes pour gérer tout cela au vu de l'évolution de la situation dans le pays ? La réponse à cette question est plus ou moins évidente. C'est pourquoi je doute encore sur tout ce qui se passe dans le pays à l'heure actuelle, concernant cette crise sanitaire. Déjà avec les vols domestiques, le risque de recrudescence de la pandémie et de sa propagation dans tout le pays plane toujours. Raison de plus, avec la reprise des vols internationaux, ce risque pourrait fortement augmenter. Et le comble c'est que la population malagasy est particulièrement réticente aux campagnes de vaccination. Du côté de chez moi à Ambolonkandrina, par exemple, le poste de vaccination ne traite pas plus de dix personnes par jour alors que c'est gratuit. Il est évident que nous ne nous protégeons pas suffisamment, donc comment pouvons-nous affronter une nouvelle menace ?

Aina Raveloson, présidente de la Confédération du Tourisme de Madagascar (CTM)

« Freiner la pandémie, ce n'est pas juste une question de fermer les frontières, c'est aussi une question d'appliquer les gestes barrières »

Nous avons été contents d'apprendre que la campagne de vaccination publique actuelle s'est élargie et que les autorités ont vraiment voulu tirer parti de cette opportunité. La vaccination nous semble nécessaire en premier lieu pour des raisons médicales évidentes de protection de soi, car nous avons tous vu l'effet de la pandémie dans notre pays, surtout durant la deuxième vague. Mais d'autre part, la vaccination est aussi en train de devenir une norme internationale pour pouvoir accueillir les visiteurs étrangers. Nous avons pu organiser une campagne pour que le personnel touristique volontaire soit vacciné avec l'appui de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). La CTM a enregistré jusqu'à présent un peu plus d'un millier de personnes à Tanà qui ont pu bénéficier du vaccin et la sensibilisation continue.

Dans le cadre de la réouverture des frontières, la stratégie qui est en train d'être discutée entre les autorités et le secteur privé, vise vraiment à identifier toutes les mesures d'accompagnement, y compris une reprise progressive des vols et le traitement des passagers à l'arrivée et durant leur séjour, tout cela afin de pouvoir sécuriser au mieux notre population. Freiner la pandémie, ce n'est pas juste une question de fermer les frontières, c'est aussi une question d'appliquer les gestes barrières, de ne pas encourager les regroupements, d'appliquer des mesures d'hygiène et surtout de répandre la vaccination pour atteindre cette immunité collective. Tout le monde doit amener sa contribution pour essayer d'avancer. Des personnes ont évoqué l'idée de voyage sans contact comme hypothèse pour la réouverture des frontières. Mais le fait de ne pas autoriser que les touristes soient en contact avec la population, c'est tout simplement remettre en cause l'idée de l'expérience du voyage. Donc, on ne peut pas procéder de cette manière. Par contre, ce que l'on peut faire, c'est vraiment de limiter les risques sanitaires en prenant un maximum de précautions en amont du voyage et pendant le séjour touristique. Madagascar figure parmi les 10 derniers pays au monde à rester encore fermés. Il est temps de rouvrir pour ne pas cumuler encore plus de retard et appauvrir davantage notre économie.

Eric Razafimaitra, manager de MalagasyCar, transport de première classe

« Pour l'ouverture des frontières, mais sous certaines conditions... »

« En tant qu'opérateur, surtout dans le domaine du tourisme, je suis pour l'ouverture des frontières aériennes. Toutefois, de mon point de vue, cette réouverture ne peut se faire que sous certaines conditions. Les procédures de contrôle des voyageurs doivent être renforcées au départ comme à l'arrivée. Les autorités doivent être particulièrement strictes concernant le confinement obligatoire pour mieux évaluer la santé de chaque voyageur, mais aussi pour éviter qu'il ne contamine d'autres personnes si par malheur il porte le virus. Un contrôle plus soutenu permettrait de mieux protéger tout le monde. Les tests doivent également être toujours maintenus. Cette maladie ne va pas partir du jour au lendemain, nous l'avons très bien compris. De ce fait, c'est à nous de nous adapter et d'apprendre à vivre avec cette pandémie, sinon ce sera notre économie qui en subira les frais. Pour ma part, par exemple, plus de la moitié de mes clients viennent de l'étranger, notamment des touristes ou encore des membres de la diaspora souhaitant profiter de leurs vacances dans la Grande île. Depuis la fermeture des frontières, notre entreprise rencontre de nombreuses difficultés.

Nous essayons de conquérir le marché local mais jusque-là, c'est encore loin de suffire ».

Rova Randria & Hary Rakoto

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Editorial

  • La question !
    L’espoir serait-il permis ! L’Assemblée nationale, réunie en séance plénière votait le lundi 2 décembre la mise en place de la « Commission spéciale de mise en accusation » auprès de la Haute Cour de justice (HCJ) dont l’élection du président. Les députés présents ont élu à l’unanimité le candidat présenté par le groupe parlementaire Isika rehetra miaraka amin’ny Andry Rajoelina (IRMAR) Haja Resampa, le députe IRMAR élu dans le Menabe (Morondava). Il succède à ce poste, très délicat, à Honoré Tsabotokay, présidant la Commission de mise en accusation lors de la précédente législature, député élu dans la Circonscription de Vohipeno (Sud-est).

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