Radicale. La décision est tombée mardi dernier, la Banque Foiben’i Madagasikara (BFM) a annoncé une hausse de son taux directeur à 12 %, contre 10,5 % précédemment. Derrière ce chiffre technique se cache une réalité bien concrète car emprunter de l’argent coûtera désormais plus cher, pour les ménages comme pour les entreprises. En toile de fond, une inflation à craindre et un contexte international tendu. En effet, depuis deux ans, l’inflation ne cesse de grimper, tirée par la hausse du prix du riz, des produits importés et de l’énergie domestique. En mars 2025, elle atteignait déjà 8,4 % en glissement annuel, un niveau bien supérieur aux prévisions. Face à cette spirale, la BFM a opté pour un durcissement de sa politique monétaire. « Il s’agit de calmer les anticipations d’inflation et de préserver la stabilité des prix à moyen terme », explique un socio-économiste ayant suivi cette tendance haussière de près. Cependant sur le terrain, cette stratégie peine à convaincre. « Cette décision va freiner brutalement l’activité économique. L’accès au crédit va se restreindre, en particulier pour les PME déjà fragilisées par la hausse des coûts », s’alarme un opérateur du secteur agroalimentaire. Selon lui, le risque est réel de voir une partie du tissu entrepreneurial s’asphyxier dans les mois à venir, faute de trésorerie et de perspectives.
Plaie profonde
Cependant, notre socio-économiste reconnaît la nécessité d’agir face à l’inflation, mais appelle à un dosage plus fin : « Relever les taux d’intérêt est un outil classique, mais il ne faut pas en faire une réponse unique. Il faut aussi agir sur les facteurs structurels : la dépendance aux importations, le déficit énergétique, ou encore l’instabilité logistique. Sans cela, la politique monétaire restera un simple pansement sur une plaie profonde». Du côté des ménages, la pilule est amère. Un père de famille de quatre enfants résidant dans l’Atsimondrano, témoigne : « Le riz coûte déjà le double d’il y a deux ans. L’électricité, on la coupe pour ne pas exploser le budget. Et maintenant, on nous dit que tout va devenir encore plus cher, même les crédits ? C’est comme si on nous demandait de survivre sans respirer ». Pour lui, la situation frôle la détresse car les petits salaires ne suivent plus, et les aides sociales restent insuffisantes ou quasi inexistantes. La BFM, de son côté, dit rester vigilante et prête à ajuster sa politique si la situation venait à empirer. Mais à Madagascar, où près des trois quarts de la population vivent sous le seuil de pauvreté, la bataille contre l’inflation ne peut ignorer les conséquences sociales de ses propres remèdes.