Cette performance spectaculaire est le fruit d’un accompagnement massif : 200 tonnes de semences hybrides et 6 000 tonnes d’engrais ont été distribuées à 32 000 producteurs répartis dans 44 Districts. Le secrétariat d’Etat en charge de la Souveraineté alimentaire se félicite de ces résultats. Sur le terrain, c’est un vent d’espoir qui souffle car les paysans y voient enfin une réponse aux aléas climatiques et à la stagnation des récoltes. « Si ça continue comme ça, on pourra même vendre une partie de notre production au lieu de tout garder pour la consommation », glisse modestement Bodo, une mère de famille cultivatrice.
Limité
Mais derrière cette réussite apparente, des voix commencent à s’interroger sur les limites du modèle. Les semences hybrides, souvent importées, nécessitent des intrants spécifiques et un encadrement technique continu. « Sans les engrais fournis, est-ce qu’on aura les mêmes résultats la saison prochaine ? », s’interroge un technicien agricole local. La dépendance potentielle à ces semences dites “non reproductibles” soulève aussi la question de la souveraineté réelle sur le long terme. « Le risque, c’est que les producteurs ne puissent plus revenir aux semences traditionnelles une fois qu’ils ont goûté à ces rendements. Mais à quel coût ? », avertit un agronome basé à Antananarivo. Certains agriculteurs avoue déjà leur inquiétude : « On est content, oui, mais on se demande comment faire si l’aide s’arrête », confie Randimby, la soixantaine, habitué aux rizières du Betsimitatatra depuis son enfance. Le succès immédiat ne doit pas masquer les enjeux à venir : sécuriser les prochaines campagnes, assurer une production locale des semences et éviter une nouvelle forme de dépendance. Autrement, la promesse d'une souveraineté alimentaire risque bien de se transformer en mirage.