Marc Ravalomanana et Hery Rajaonarimampianina se rappellent de nouveau au bon souvenir de la population malagasy, non pas pour présenter un quelconque mea culpa sur leur gestion passée, mais pour tenter de torpiller le sommet de la SADC prévu à Antananarivo. Dans une lettre commune transmise aux hautes instances régionales et relayée bruyamment dans les médias, les deux anciens présidents suggèrent ni plus ni moins que le transfert de l’événement dans un autre pays membre, au nom d’une supposée dérive démocratique actuelle. De quoi faire sourire... ou grincer des dents.
En effet, pour beaucoup Marc Ravalomanana qui s’érige en grand défenseur de la démocratie et de la bonne gouvernance, c’est l’hôpital qui se moque de la charité. L’homme qui avait appelé les États-Unis, en pleine crise de 2009, à ne pas renouveler les avantages commerciaux de l’AGOA à Madagascar – au prix de milliers d’emplois – pour des motifs purement politiques, se pose aujourd’hui en défenseur des intérêts nationaux ? La ficelle est un peu grosse.
De même, ils dénoncent à tout-va des arrestations “arbitraires” ou un “climat hostile à la presse”. Il est nécessaire de souligner pourtant qu’aucun journaliste n’a été jeté derrière les barreaux sous le régime actuel pour des motifs liés à l’exercice de son métier. En outre, ́es médias d’opposition publient quotidiennement tribunes, critiques et enquêtes – parfois fantaisistes, souvent militantes – dans une liberté qui n’existait pas sous leurs mandats respectifs. De l’autre côté on se souvient des déboires des deux ex-présidents avec la presse.
Pleurnicher
Faut-il rappeler à Hery Rajaonarimampianina que durant son mandat, des journalistes ont été emprisonnés pour leurs écrits ? Que plusieurs professionnels des médias ont été poursuivis pour avoir simplement osé critiquer le fameux Code de la Communication, alors jugé liberticide ? À cette époque, la liberté d’expression n’avait rien d’une évidence. Et pourtant, c’est bien dans ce contexte que le sommet de la Francophonie a été organisé à Antananarivo en 2016 – sans que l’opposition d’alors, aujourd’hui au pouvoir, ne l’entrave dans ses préparatifs. Une élégance politique qu’ils ne daignent pas rendre aujourd’hui.
Par ailleurs, évoquer une “crise de légitimité” en pointant le taux d’abstention ou l’exclusion de certains candidats lors de l’élection présidentielle, c’est oublier un peu vite qu’eux-mêmes ont profité, à leur époque, de scrutins contestés pour Ravalomanana et d’une légitimité tout aussi relative pour Rajaonarimampianina. Par ailleurs, la nationalité du chef de l’État a été scrutée, décortiquée, validée, sans qu’aucune preuve de fraude n’ait jamais été apportée. En clair, les accusations portées par les deux anciens chefs de l’État à l’encontre du président Andry Rajoelina tiennent davantage du règlement de comptes personnel que d’une analyse objective.
Force est en tout cas de constater que Marc Ravalomanana perpétue sa manie de pleurnicher auprès de la SADC dès qu’il est mis en échec sur la scène nationale. Depuis quinze ans, il en appelle à son arbitrage pour justifier son propre entêtement. Rebelote aujourd’hui, au moment même où le président Andry Rajoelina s’apprête à prendre la présidence tournante de l’organisation. Faut-il y voir une peur de voir gagner l’actuel numéro Un du pays en stature régionale voire internationale ?
En tout cas, suggérer le déplacement du sommet d’Antananarivo, c’est nier l’opportunité majeure qu’un tel événement représente pour Madagascar en termes de visibilité, de diplomatie et de retombées économiques. Un sommet d’une telle ampleur est une vitrine que peu de pays obtiennent.
La Rédaction