Etre lanceur d’alerte coûte cher à Madagascar. Ce n’est pas à Angélique Annie Razafindrazoary de contredire ce constat. D’épreuves en épreuve, cette femme battante et son époux Stéphane Décampe ont passés ces dernières années. Meurtre d’un proche collaborateur, menace de mort en face-à-face et abattage des animaux sauvages sous leur protection en sont des exemples réellement vécus.
Jeudi dernier, aux environs de minuit, un incendie manifestement d’origine criminelle s’est déclaré sur leur propriété localisée sur la rive gauche du Canal des Pangalanes au niveau du village d’Andranokoditra, dans la Commune rurale d’Ambinaninony, Brickaville, à une soixantaine de kilomètres au sud de la ville de Toamasina. « Hier soir à minuit, quelqu’un est venu pour mission de brûler le cœur de l’hôtel (Hôtel Pangalanes Jungle Nofy, ndlr), sa cuisine et le restaurant », a rapporté le propriétaire sur les réseaux sociaux.
Le feu a été vite maîtrisé grâce à une réactivité salvatrice d’une équipe de bénévoles de l’association française Armada, présente depuis quelques jours dans la localité pour des œuvres humanitaires une fois par an à Madagascar. L’incendie a épargné le restaurant. Même si aucune perte en vie humaine ni blessure n’ont été déplorées, les dégâts ont été assez importants. « Nous avons perdu la cuisine et vraiment tout ce qu’il y a avait dedans », a déploré le propriétaire en gardant son sang froid.
Le couple franco-malagasy dit ne pas avoir encore porté plainte. L’identité du suspect ou des suspects n’est pas encore connue non plus. Les activités commerciales de l’hôtelier-restaurateur continuent comme si de rien n’était grâce à l’instantanéité des soutiens des amis qui se sont mobilisés pour lui venir en aide sur-le-champ. Il s’agit en effet d’un coin de rêve où des VIP et membres de la jet-set ont l’habitude de passer des moments de détente.
C’est aussi le centre de commandement de la protection de la forêt classée de Vohibola abritant des espèces endémiques qui n’existent nulle part ailleurs comme la plus petite grenouille et le plus petit caméléon au monde. Sa richesse naturelle exceptionnelle fait de cette forêt un terrain favorable à toutes sortes de trafic. La lutte contre les activités illégales à l’intérieur du site afin de le protéger voire sauver expose les responsables de l’association Razan’i Vohibola à des risques permanents.
Les trafiquants et leurs complices mènent la vie dure à sa présidente, la lanceuse d’alerte Angélique Annie Razafindrazoary, et son époux. Armé de courage, le couple ne se laisse jamais faire facilement. Les différentes organisations œuvrant pour la nature et les droits de l’homme ne le laissent pas non plus se battre seul. De plus en plus d’actes criminels ciblent les lanceurs d’alerte à Madagascar ces derniers temps. Ces personnes ont besoin de protection. Une nouvelle loi devrait être adoptée en leur faveur.
M.R.