Faut-il rappeler en effet qu’ « avant 72 » (un terme devenu l’expression consacrée pour désigner la période faste de l’après indépendance), Madagascar figurait en tête des pays les plus prospères de l’Afrique francophone, voire de l’Afrique tout court. Dans l’océan Indien, la Grande île méritait bien son nom, pas seulement en raison de sa superficie, mais aussi en étant considérée comme l’Eldorado par les habitants des îles voisines (La Réunion, Île Maurice, Comores). Beaucoup de ces derniers avaient choisi d’émigrer à Madagascar pour y chercher un avenir meilleur. Ce qui veut tout dire.
« Avant 72 », tout le système éducatif était considéré comme l’un des meilleurs au monde, à un tel point que les établissements publics - du primaire à l’université en passant par le secondaire - étaient pris d’assaut aussi bien par la population locale (malgache ou étrangère) que par des migrants. C’est ainsi que les EPP, collèges et lycées publics de l’époque étaient à l’image des Ecoles primaires françaises et autres lycées français d’aujourd’hui : une fréquentation cosmopolite mais avec les écolages faramineux en moins, puisqu’y étudier était tout simplement…gratuit. Il en était de même à la prestigieuse université Charles de Gaulle d’Ankatso d’où sont sortis beaucoup de grands bâtisseurs éparpillés de par le monde.
En matière d’infrastructures, bon nombre de celles dont dispose actuellement le pays datent d’« avant 72 ». Pour ne citer que l’écrasante majorité des routes nationales existantes, les logements sociaux (les cités érigées dans le cadre de la vaste politique de logement des années 60) etc… Beaucoup s’interrogent d’ailleurs si elles auraient pu exister si elles n’avaient pas été construites à cette époque, vu que même leur entretien n’a pu être assuré par la suite.
Loin de nous l’idée de ternir la mémoire de ceux qui sont tombés sur la place de l’Indépendance un certain 13 mai 1972, mais en toute objectivité, force est de constater que ce tournant de l’histoire de la Grande île l’a menée droit dans un gouffre profond d’où elle peine encore à sortir plus d’un demi-siècle plus tard. Dama, pour en revenir à lui, en faisant le parallèle entre le mouvement de 1972 et l’actuelle manifestation de contestation des 11 candidats, n’a fait qu’attiser la réticence de ceux qui ne veulent pas refaire la même erreur collective qu’en 1972. Et ils sont nombreux.
Et le plus cocasse dans l’histoire, c’est que, en poussant la récupération politique à son comble, le collectif des 11 candidats a déclaré le plus sérieusement du monde dédier leur journée de manifestation de samedi dernier à la commémoration de la date du 14 octobre. Ces prétendants à la magistrature suprême du pays ont seulement oublié qu’il s’agit de la date-anniversaire de la naissance de la première République, celle-là même que leur soutien Dama semble être particulièrement fier d’être l’un des artisans de la chute. A force de faire feu de tout bois, on s’expose au retour de flamme.
La Rédaction