Un grave accident de la route s’est produit mardi soir, aux environs de 19h15, sur la Route nationale 2, au niveau d’Antsampazana, Fokontany d’Andranokobaka, point kilométrique 6+200. La collision, particulièrement violente, a impliqué une Peugeot 206 et un motoculteur de marque Kubota.
Le bilan fait état d’un décès — un homme de 26 ans — et de quatre blessés, dont deux femmes âgées de 28 et 30 ans, ainsi que deux hommes de 19 et 39 ans. Les circonstances exactes du drame restent à préciser, mais selon les premiers éléments recueillis, la Peugeot aurait tenté un dépassement dangereux avant d’entrer en collision frontale avec le motoculteur.
Alertée, une équipe du commissariat de Moramanga s’est immédiatement rendue sur les lieux pour effectuer les constatations d’usage. Les blessés ont été évacués d’urgence vers le Centre hospitalier de référence du District (CHRD) de Moramanga pour y recevoir les soins nécessaires. Le procureur près le Tribunal de première instance de la ville a également été informé de l’accident.
Une enquête a été ouverte afin d’établir les responsabilités et de déterminer les circonstances précises de cette tragédie survenue sur l’un des axes les plus fréquentés de la région.
Franck R.
Un retour à la normale plane. Bon nombre d’établissements scolaires privés ont repris depuis mardi dernier leur emploi du temps normal. Les cours se font désormais dans la journée, du moins pour les élèves du primaire et du secondaire. Pour ceux en préscolaire, les cours se font encore dans la matinée, du moins jusqu’à ce que la situation s’améliore. Toutefois, des mesures ont été prises pour rattraper les quelques jours de suspension des cours, due aux manifestations populaires. « Les élèves n’auront pas la pause Toussaint, initialement prévue du 25 octobre au 2 novembre prochains. Cette semaine sera dédiée aux rattrapages, pour être à jour dans le respect du calendrier scolaire. Les élèves ont eu assez de pause ces derniers jours », nous confie la directrice d’un collège privé sis à Tsimbazaza. Cette décision est également adoptée par bon nombre d’établissements scolaires, d’autant plus que les parents ont payé normalement les frais de scolarité malgré la conjoncture politique et ses impacts.
Reprise incertaine pour certains
Si la reprise des cours est effective pour bon nombre d’établissements privés, elle reste incertaine pour la majorité des établissements publics dans diverses Circonscriptions scolaires (CISCO) où les enseignants sont en grève. Hier, les élèves d’un collège d’enseignement général d’Antananarivo ont été priés de rentrer chez eux. « Tous les profs ainsi que le personnel administratif et technique sont en grève. Il n’y a personne pour vous donner des cours ni vous surveillez en classe. Rentrez chez vous et révisez », s’est adressé le directeur face aux élèves présents. « J’en ai marre de cette situation. Comment allons-nous faire pour la suite vu que nous sommes en classe d’examen ? », déplore Sitraka R., collégienne en classe de 3è. Comme elle, beaucoup d’élèves se posent des questions sur l’aboutissement de cette manifestation ainsi que les impacts sur leur scolarité. Jusqu’à hier, aucun communiqué ni consigne n’a été donné par les responsables compétents au niveau du ministère de l’Education nationale ou auprès des directions régionales de l’éducation. Affaire à suivre!
P.R.
Madagascar est un pays vulnérable aux catastrophes naturelles comme les cyclones, l’inondation, ou encore la sécheresse. Par conséquent, la population est fragile. Afin de soutenir cette population, Madagascar dispose d’un Fonds national de contingence (FNC). C’est un mécanisme de financement dédié à la gestion des catastrophes à Madagascar. Ce fonds a été mis en place par le Gouvernement malagasy afin de renforcer la préparation et la réponse face aux catastrophes et situations d’urgence, tout en garantissant la disponibilité de ressources financières immédiates en cas de crise. Ainsi, le FNC a pour objectif de consolider une capacité de résilience et la préparation à faire face aux divers types de catastrophes qui peuvent survenir dans le pays.
Le Fonds national de contingence peut être mobilisé pour répondre aux catastrophes naturelles telles que les cyclones, les inondations, les sécheresses, les incendies domestiques, feux de forêt ou de végétation, les épidémies et pandémies majeures ayant un impact grave sur la population. Les catastrophes sensibles ou aléas complexes tels que les troubles sociaux ou politiques et les conflits armés ne sont pas éligibles à la mobilisation du FNC.
Un rôle important pour le PAM
Cette année, la journée internationale pour la réduction des risques de catastrophes est axée sur le thème “Financer la résilience, pas les catastrophes”. Le Programme alimentaire mondiale (PAM) joue un rôle important dans la réduction des risques et catastrophes. Les catastrophes naturelles sont l’une des principales causes de la faim, indique cette institution. Elles perturbent l’accès à la nourriture et compromettent la sécurité alimentaire à long terme. A Madagascar, le PAM, avec ses partenaires, agit pour soutenir les communautés vulnérables à se préparer, résister et se relever face aux chocs à travers le renforcement de la résilience, les systèmes d’alerte précoce, la préparation et formation, ainsi que le soutien aux moyens de subsistance et adaptation au climat.
Anticiper les impacts des catastrophes
Pour la réduction des risques de catastrophes, Madagascar dispose une entité qui coordonne la lutte. Il s’agit du Bureau national de gestion des risques et des catastrophes (BNGRC).
Les catastrophes ont un impact majeur sur le développement du pays.
En effet, elles peuvent entraîner la désorganisation ou le ralentissement des projets de développement, la détérioration des infrastructures socio-économiques, ainsi que des conséquences importantes sur l’environnement et les moyens de subsistance. C’est pourquoi le renforcement de la résilience financière est essentiel pour permettre une reprise rapide et durable après une catastrophe.
L’augmentation des ressources financières disponibles, la budgétisation fondée sur les prévisions climatiques, les évaluations financières préalables des risques pour la population, les moyens de subsistance et les infrastructures sont considérées comme les meilleures stratégies pour anticiper et réduire les impacts des catastrophes.
Recueillis par Anatra R.
Les portes du Centre culturel Germano-Malagasy (CGM/GZ) sont restées fermées ces dernières semaines, plongeant dans le silence, comme figées par les tensions qui agitent le centre d’Antananarivo. Expositions annulées, concerts reportés, ateliers en pause : la vie culturelle, déjà fragile, s’est mise entre parenthèses face aux rassemblements et mouvements sociaux perturbant la Capitale. Face à tout cela, le Centre culturel Germano-Malgache (CGM/GZ) refuse de laisser la crise freiner la vitalité artistique qu’il incarne depuis des années. L’institution allemande a choisi une voie innovante pour continuer à soutenir la scène locale : le numérique. C’est ainsi qu’est né le projet « MeinOrt » – « Mon lieu » en allemand – une initiative qui réinvente la manière dont la culture peut s’exprimer et se partager en ces temps incertains. Plutôt que de se résigner à l’immobilisme, le CGM/GZ a décidé de transformer sa page Facebook en une véritable scène virtuelle ouverte à tous les talents. Musiciens, slameurs, danseurs, comédiens ou plasticiens sont invités à soumettre de courtes vidéos, tournées dans leur environnement, que ce soit à domicile, en studio ou dans tout autre espace propice à leur performance. Ces créations, d’une durée comprise entre 15 et 45 minutes, seront diffusées en direct ou en différé sur les réseaux sociaux du Centre, offrant une visibilité immédiate à une audience malagasy et internationale. Au-delà de la simple diffusion, le projet « MeinOrt » propose également un soutien financier pouvant atteindre 1 500 000 ariary, en fonction de la qualité et de l’originalité des propositions. Une véritable bouffée d’air pour les artistes qui peuvent continuer à exprimer leur créativité malgré les contraintes du contexte actuel. En redonnant la parole à la scène locale, le CGM/GZ confirme son rôle de moteur culturel et d’espace de liberté, même à distance. Le numérique devient ainsi un nouvel horizon, un pont entre artistes et publics, permettant à la culture malagasy de rayonner, sans frontières ni limites physiques. Une preuve que face à l’adversité, l’innovation et la solidarité peuvent continuer à faire vibrer le cœur de la création.
Si.R
Thierry de Bailleul, directeur général de Madagascar Airlines, a annoncé sa démission hier. Cette décision fait suite à un ultimatum lancé par le personnel. Les employés exigeaient le départ immédiat du DG et de tous les consultants étrangers. La date limite était fixée au 17 octobre à midi. Passé ce délai, ils prévoyaient de ne plus suivre aucun ordre de la direction actuelle. Une direction collégiale devait alors prendre le relais. Selon Thierry de Bailleul dans une lettre. Ce climat de défiance rendait la poursuite de sa mission impossible. « Je ne peux, ni moralement ni professionnellement, diriger une entreprise dans laquelle une partie du personnel conteste publiquement l’autorité légitime de sa direction générale », a-t-il expliqué. Depuis dix-huit mois, le DG et son équipe ont mené un combat exigeant pour redresser la compagnie. « Grâce à ces efforts, la capacité offerte a progressé de 66% en moins de deux ans. De plus, la ponctualité sur l’ensemble de 2025 a atteint 80%. Par ailleurs, la digitalisation de l’entreprise est désormais très avancée. La flotte d’ATR 72 s’est renforcée et la confiance des loueurs a été regagnée. Enfin, les pertes se sont réduites trimestre après trimestre, et un retour à l’équilibre semblait réaliste », a-t-il ajouté.
Difficultés
Thierry de Bailleul est arrivé fin 2022. Son mandat devait initialement se terminer le 30 juillet 2025, mais il a été reconduit fin août. Selon les autorités à cette époque, « cette prolongation visait à assurer la continuité du plan stratégique « Phenix 2030 », soutenu par la Banque mondiale. Le plan prévoit de moderniser la flotte, d’améliorer la gestion digitale et de repenser la stratégie commerciale ». Pour soutenir le redressement, la Banque mondiale a alloué 65 millions de dollars. Sur cette somme, 25 millions sont déjà disponibles. Par ailleurs, 80 millions supplémentaires sont en cours de négociation, dont la moitié pour Madagascar Airlines et l’autre moitié pour les infrastructures aéronautiques. Pourtant, malgré ces résultats, la situation sociale est devenue intenable. M.Bailleul a donc choisi de se retirer pour préserver l’entreprise, ses salariés et sa crédibilité auprès des partenaires internationaux, notamment la Banque mondiale. Ce dernier propose au Comité exécutif d’assurer collégialement la continuité opérationnelle. « Cette mesure vise à éviter toute rupture dans le pilotage des opérations en attendant les décisions du Conseil d’administration », a-t-il conclu.
Carinah Mamilalaina
A en croire au nième « Fanambarana » émanant des militaires cette fois-ci relayé par les médias publics et certaines chaînes privées et partant du Palais d’Etat d’Ambohitsorohitra, le pays change de dirigeants au sommet de l’Etat. Le colonel Michaël Randrianirina, chef du CAPSAT (Corps d’administration des personnels et des services de l’armée de terre), devient Chef d’Etat, en lieu et place de Rajoelina Andry Nirina. Jusque-là, le commun des mortels semble gober l’information inédite sans pouvoir réagir ni émettre son avis. D’ailleurs, on ne l’a pas demandé !
Tellement l’évolution de la situation tourne à une vitesse supersonique qu’on est un peu dépassé par les évènements. Jusqu’à hier, les acteurs directs, militaires, les députés et la Haute Cour constitutionnelle, tentaient de lever les voiles pour donner le moindre de lumière. Les concitoyens au même titre que les analystes et observateurs attendent et même exigent de la visibilité. Entre « Fanambarana », vote de déchéance de l’A.N. et décision de la HCC, les esprits hésitent. Le problème issu du déficit de la visibilité entraine un certain doute sur la crédibilité de l’acte et craint le tâtonnement. De toute façon, le conclave au CAPSAT de mardi soir contribuerait, espérons-le, à dissiper le voile.
Ceci étant, par la Décision n° 10 – HCC / D3, vu la vacance de poste du Chef de l’Etat, dans un de ses « déclarants » concède la charge du Chef d’Etat au colonel Michaël Randrianirina. Et on y est !
Etant vu les longues expériences vécues de ma part, je crois avoir le droit et le devoir d’attirer l’attention des nouveaux dirigeants du pays. Devant la complexité et la délicatesse des charges qui vous attend, je voudrais tirer la sonnette d’alerte sur quelques points qui menacent la bonne marche.
Dès le départ du « convoi », il va falloir une visibilité du trajet à parcourir. Autrement, un plan de vol précis. L’aventure sans objectif net risque de conduire le pays à l’impasse. Les leçons de l’Histoire suffisent pleinement à servir de balises à tout dérapage. Ne soyez pas trompés par le fait que vous, les nouveaux tenants du pouvoir, vous seriez à l’abri des erreurs. Négatif, c’est un fauve qui guette à tout moment. Le pays ne peut plus tolérer des imprudences et des manques de vigilance.
Méfiez-vous que vous ne soyez pas tombés dans les griffes des vieux briscards de la politique. Rappelez-vous que l’adhésion populaire effective au ‘‘Hetsika’’ des jeunes de la Gen Z s’explique facilement par le fait que le mouvement reste fidèlement apolitique. Soyez vigilants en tout temps. En tout cas, attention à la naïveté.
Ne soyez pas tombés dans le piège de la chasse aux sorcières. Certainement, les auteurs qui ont conduit le pays à la ruine doivent payer de leurs actes. Mais attention, avec l’existence des preuves irréfutables présentées auprès des autorités judiciaires. A elles de prendre les mesures qui conviennent. Qu’il n’y ait aucune chasse aux sorcières ni nettoyage politique à la manière des purges staliniennes. Et enfin, évitez la tentation de la dictature !
Le Conseil national pour le renouveau sous la houlette du colonel Michaël Randrianirina aura la lourde et délicate tâche de mener la Nation vers le renouveau. Un pari sinon un défi épineux mais pas impossible !
Ndrianaivo
L'Assemblée nationale malagasy a connu un bouleversement significatif hier, avec l'élection de Siteny Randrianasoloniaiko à la présidence. Cette nomination intervient après de la destitution de l'ensemble des membres du bureau permanent, sauf le vice-président de l’Opposition. Et ce, dans un vote qui a marqué une volonté claire de changement au sein de la Chambre basse. Candidat unique à la présidence après le retrait stratégique d'Ahmad Ahmad, il a recueilli une large majorité des suffrages des députés réunis à Tsimbazaza. Sur les 104 députés prenant part au vote, 94 ont marqué leur accord pour sa désignation, témoignant d'un soutien conséquent pour le nouveau président. Dans son premier discours en tant que président de l'Assemblée nationale, Siteny Randrianasoloniaiko a affirmé son ambition de dépasser les clivages partisans. Il a ainsi annoncé son retrait du groupe parlementaire Firaisankina, stipulant sa volonté de représenter et de servir l'ensemble des élus de Madagascar, indépendamment de leurs affiliations politiques.
Ce nouveau chapitre s'ouvre dans une atmosphère de transition, suite à la destitution précédemment votée. En effet, conformément à l'article 16 du Règlement intérieur de l'Assemblée nationale, un vote a été organisé ce même mercredi pour démettre de leurs fonctions les membres du bureau permanent (6 vice-présidents, 3 questeurs et 2 rapporteurs généraux). Le résultat fut sans appel vu que sur les 133 députés ayant pris part au scrutin, 127 se sont prononcés en faveur de la destitution, une majorité plus que confortable dépassant largement les deux tiers requis. Seuls trois députés ont exprimé un vote défavorable, tandis que trois autres ont opté pour le vote blanc ou nul. L'élection du reste des membres du nouveau bureau permanent est attendue dans les prochaines heures, marquant ainsi la pleine constitution des organes de direction de l'Assemblée nationale. Les prochains jours seront déterminants pour observer la mise en œuvre des orientations promises par le nouveau président et évaluer l'impact de ce renouveau sur le paysage politique malagasy.
Nikki Razaf
Les premières sanctions sont tombées suite au récent renversement du pouvoir à Madagascar. L'Union africaine (UA) a annoncé, hier après-midi, la suspension immédiate du pays de ses instances. Cette décision a été entérinée lors d'une session du Conseil de paix et de sécurité de l'UA, spécifiquement consacrée à la situation malgache. Le président de la Commission de l'UA, Mahmoud Ali Youssouf, a fermement condamné "tout changement de gouvernement par des moyens inconstitutionnels", réaffirmant la position de l'organisation en faveur du respect de l'ordre constitutionnel et du règlement pacifique des différends. Madagascar rejoint ainsi d'autres nations africaines, telles que le Soudan, le Mali, la Guinée, le Burkina Faso, le Niger et le Gabon, dont l'adhésion a déjà été suspendue pour des motifs similaires depuis 2021. Parallèlement à cette suspension, l'UA a appelé à une réponse coordonnée avec la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) et la Commission de l'océan Indien (COI). Une mission d'établissement des faits est également proposée afin de guider les prochaines actions de l'Union africaine.
De son côté, la présidence malgache a sollicité le soutien de la communauté internationale. Dans un appel vibrant au respect de la Constitution et des institutions légitimes, elle met en garde contre les risques de violence civile, de représailles, d'atteintes massives aux droits de l'homme, de fragilité économique et de perte de confiance internationale. « Ensemble, condamnons publiquement les actes de coup d’Etat militaire et institutionnel car ils portent atteinte à la sécurité et à la sérénité quotidienne des populations. Seul le retour à l’ordre constitutionnel garantirait une reprise du cours normal de la vie de la Nation », selon le document. Ces violations constitutionnelles et des droits humains sont en contradiction flagrante avec les valeurs fondamentales malgaches, ainsi qu'avec les engagements internationaux et les principes directeurs de l'UA et de la SADC.
Nikki Razaf
Les 25 et 26 septembre, Antananarivo a sombré dans une violence rare. En quelques heures, les quartiers commerçants du centre et des périphéries proches ont été dévastés : boutiques pillées, entrepôts incendiés, vitrines éventrées.
Une violence urbaine d’une ampleur inédite depuis plus d’une décennie qui laisse derrière elle un paysage d’éclats et de ruine. Derrière les images de chaos, une autre réalité se dessine : celle d’une Capitale économiquement sinistrée. Ces deux nuits de saccage entraînent des vies brisées et des mois voire des années de reconstruction matériels, psychologiques et morales.
Une ville meurtrie
Dès l’aube du 27 septembre, la ville s’est réveillée dans le silence, traversée par une odeur de fumée et de cendres. Dans les allées dévastées de Tana waterfront d’Ambodivona, Tanjombato, Analamahitsy ou Ankazomanga, les rideaux de fer sont restés baissés pendant plusieurs jours, les trottoirs sont jonchés de débris. Des commerçants, hagards, dressent des bilans dérisoires.
« J’ai tout perdu », souffle Miora, vendeuse de vêtements. « Le stock, les étagères, jusqu’à la caisse. J’avais cinq employés. Je ne sais pas si je pourrai les reprendre. »
Le premier chiffrage est vertigineux : 200 milliards d’ariary de pertes directes, 2 000 emplois supprimés annonce le Président de la République. A première vue, les commerces concentrent 80% des pertes enregistrées, les services et la logistique le reste. « En une nuit, j’ai perdu vingt ans de travail », confie un autre commerçant d’Ambodivona, les yeux rougis par la fatigue et le désespoir.
Ces entreprises, petites ou grandes, faisaient vivre une multitude d’autres : artisans, livreurs, agents de sécurité, transporteurs. C’est cette toile invisible — les emplois indirects — qui s’effiloche aujourd’hui.
Même ceux qui ne travaillent pas directement avec ces commerçants victimes de pillage sont touchés par le drame. « Mon locataire qui travaillait au China mall, et dont toutes les boutiques sont pillées, vient de m’annoncer qu’il va partir car il ne peut plus s’acquitter du loyer. Il ne sait même pas ou il va aller », se désole, impuissante, Fitia Ratsimandresy propriétaire de petits appartements mis en location. Ces travailleurs consomment, prennent le bus, envoient leurs enfants à l’école. Autant de victimes collatérales de ces pillages.
L’économie urbaine à genoux
Les économistes parlent d’un effet domino. Au-delà de ces dégâts matériels, c’est tout un écosystème de petits emplois, de sous-traitants, de vendeurs ambulants qui s’effondre. Chaque commerce détruit entraîne la chute de plusieurs activités dépendantes : livreurs, grossistes, restaurateurs....
En appliquant les multiplicateurs usuels du commerce (1,3 à 1,4) et des services (1,4 à 1,6), les pertes globales s’élèvent à près de 264 milliards d’ariary.
Environ 880 emplois indirects sont menacés, en plus des 2 000 déjà perdus. Si l’on compte les familles concernées, près de 15 000 personnes pourraient être affectées.
Le tourisme, victime collatérale de l’image
L’impact dépasse les frontières urbaines. Le secteur tourisme, déjà fragile, subit un revers brutal. Les chancelleries occidentales, dont le Quai d’Orsay, ont émis des avis de vigilance renforcée ou déconseillé les déplacements non essentiels vers le pays. Dans les jours qui ont suivi, plusieurs hôtels ont enregistré des annulations massives. Le Président Andry Rajoelina lui-même a évoqué l’onde négative : « plusieurs touristes étrangers ayant annulé leurs hôtels », a-t-il déclaré.
Madagascar, qui accueillait plus de 300 000 visiteurs étrangers en 2024, espérait retrouver son niveau d’avant-pandémie. Cette trajectoire est compromise.
Selon les projections des opérateurs, une baisse de 20 à 30% du nombre de touristes pourrait être observée dans les mois à venir, soit 36 à 54 milliards d’ariary de pertes supplémentaires.
Les artisans, chauffeurs et guides touristiques de la Capitale en ressentent déjà les effets. « Les étrangers ont peur. Nous, on perd notre saison », résume sobrement un guide d’Andohalo. Sans oublier le marché des arts malagasy dont les touristes sont les principaux clients.
Les premières mesures présidentielles
Face à la gravité du choc, le Président Andry Rajoelina a convoqué à Iavoloha les représentants du secteur privé pour une réunion d’urgence. A l’issue de cet entretien, il a annoncé une série de mesures destinées à soutenir les victimes des pillages et relancer les activités économiques durement frappées.
Le Chef de l’etat a promis la mise en place de crédits à taux zéro, garantis par l’Etat, afin de permettre aux commerçants et petites entreprises de redémarrer rapidement. Il a également évoqué une exonération temporaire d’impôts et de taxes pour les entreprises sinistrées, ainsi que la suppression de certains droits de douane sur les équipements et marchandises nécessaires à la reprise.
L’Etat s’est aussi engagé à prendre en charge une partie des intérêts bancaires pour les prêts en cours, une mesure destinée à éviter un effet domino sur le système financier. Enfin, un comité spécial de coordination sera créé pour recenser les pertes, évaluer les besoins et assurer le suivi des aides.
Ces annonces traduisent la volonté politique d’éviter une crise de liquidité chez les PME, mais leur application concrète n’est pas facile.